mercredi 25 octobre 2023

À balles réelles (Sergio Ramirez)

[...] Le Printemps nicaraguayen.

    L'auteur, le livre (336 pages, 2023 et 2021 en VO) :

Sergio Ramirez est un intellectuel et journaliste du Nicaragua qui participa activement à la politique sandiniste de Daniel Ortega jusqu'à ce qu'il coupe les liens en 1994 avec ce qui était devenu une dictature.
Ses prises de positions et ses écrits lui ont valu l'exil et même la perte de sa nationalité en 2021.
Son roman À balles réelles évoque la révolte de 2018 et la sanglante répression qui s'ensuivit. C'est le troisième épisode des aventures de l'inspecteur Dolores Morales, mais Ramirez nous gratifie d'un résumé biographique de son héros pour nous permettre de prendre le train en marche !

    Le contexte :

En 2018 ont lieu à Managua, de grosses manifestations contre la dictature du couple Ortega-Murillo (son épouse est vice-présidente !). 
Les jeunes s'en prennent notamment à des sculptures modernes en forme d'arbres qui ont envahi la capitale et sont devenus le symbole des extravagances de la première senõra de la dictature [clic].
[...] – Nous sommes peut-être en train de vivre le Printemps nicaraguayen, comme il y a eu le Printemps arabe. 
– Malheureusement nous n’avons que deux saisons, l’hiver quand il pleut et l’été quand il ne pleut pas.
Des groupes paramilitaires assistent la police lors de la violente répression et des snipers sont même chargés de dégommer les manifestants ou les livreurs de journaux. 
[...] Les gamins élevaient des barricades dans les rues, les flics anti-émeutes étaient partout, des pick-up Hilux patrouillaient avec des policiers en gilets pare-balles sur les plateformes arrière. 
– Et maintenant Troie brûle vraiment, dit le père Pancho.
Il y aura plus de 300 morts.

    On n'aime pas vraiment :

 Avouons qu'il faut un peu de temps pour nous acclimater à cette prose foisonnante venue d'Amérique latine, d'autant que l'amigo Ramirez n'y va pas avec le dos de la main morte : digressions incessantes, personnages truculents, folklore envahissant, imagination débridée, ... C'est un véritable carnaval avec curés, voyantes, fantômes et guru indien, où les amateurs d'intrigues policières bien ficelées seront certainement déroutés.
 Avouons également qu'on est un peu frustré par l'intrigue : alors qu'on s'était embarqué pour apprendre plein de choses sur les manifestations et la répression, ces événements se retrouvent relégués en décor d'arrière plan et on devra se contenter de suivre les tribulations de l'inspecteur Morales revenu clandestinement à Managua et d'assister aux violences des miliciens dispersées dans un capharnaüm peuplé de curés et de figures de carnaval.

      L'intrigue :

Expulsé hors des frontières par la police politique, l'inspecteur Morales et son compagnon tentent de regagner clandestinement Managua, déguisés en prêtres, alors que les rues sont à feu et à sang.
[...] – Monseigneur est armé de paroles. Les paroles sont plus puissantes qu’une mitraillette à quatre canons, camarade. 
– Ça, ce sont des conneries. Les balles transpercent aussi les soutanes.
En parallèle, nous suivons un militaire haut-gradé de la dictature, dit Tongolele, qui est chargé de préparer la répression des manifestations.
[...] Ils vont sortir les armes et tirer sur les mômes dans les rues.
[...] Ils croisèrent de longues files de Hilux en route vers l’ouest, remplis de paramilitaires aux visages couverts et habillés de tee-shirts de différentes couleurs, qui brandissaient leurs armes de guerre. Le camarade Artemio avait raison. Les troupes ne criaient aucune consigne, ne menaçaient personne avec des mots. La démonstration était muette, mais sinistre.
[...] Un gamin intrépide est abattu au moment où il tentait d’allumer un mortier artisanal. Un autre est tué, armé d’une petite carabine 22 bonne à chasser les iguanes, avec laquelle il n’a pas réussi à tirer. À dix heures du matin, Tongolele peut informer Leónidas que la route de l’aéroport est dégagée.
Un bouquin qui plaira peut-être aux amateurs de baroque latino-américain car [dans ce pays, la poésie finit tôt ou tard par vous rattraper].

Pour celles et ceux qui aiment les révolutions.
D’autres avis sur Bibliosurf et Babelio.
Livre lu grâce à Netgalley et aux éditions Metailié

jeudi 19 octobre 2023

Le dragon du Muveran (Marc Voltenauer)

[...] L’homme qui n’était pas un meurtrier.

    L'auteur, le livre (608 pages, 2016) :

En 2016, Le dragon de Muveran fut le premier roman de Marc Voltenauer, un auteur suisse francophone au parcours original : une mère suédoise, un père allemand, un grand-père pasteur luthérien et des études de théologie à Genève.
Ce fan de polars nordiques lit les auteurs suédois dans leur langue originale : des intrigues dont il a adopté le style, fausse lenteur et vraie profondeur, pour ses propres romans qu'il situe à Gryon, petit village du canton de Vaud au pied du Grand Muveran et des Alpes suisses.

    On aime un peu :

❤️ On aime bien sûr l'exotisme de la langue de nos voisins, le café renversé, les "faites seulement", quand ça joue ou ça joue pas, ...
❤️ Habituellement on est plutôt allergique au décorum ecclésial mais là, on a pu apprécier la richesse de la symbolique biblique utilisé par le tueur et mise en scène sans prosélytisme par un auteur qui faillit bien être prêtre. Un petit parfum exotique en somme !
[...] Les premiers chrétiens utilisaient un principe appelé isopséphie qui associe les noms et les chiffres. Chaque lettre a une valeur numérique en fonction de sa place dans l'alphabet et le chiffre d'un nom est le total de ses lettres. Le 666 représente l'empereur César Néron qui fut un grand persécuteur de chrétiens.
 Bien sûr, il s'agit d'un premier roman : l'écriture manque encore de régularité, de personnalité et la mise en scène n'échappe pas aux tenaces clichés du genre (le médecin légiste, le whisky et les cigares au coin du feu, ...).
[...] Il savait d’expérience que les premières impressions étaient déterminantes pour la suite de l’enquête. La scène du crime était un livre ouvert. Il fallait l’observer, le lire, l’étudier, l’écouter.
[...] Andreas alluma un cigare, un Robusto de Cohiba. Une marque créée à l’origine pour Fidel Castro et les hauts dignitaires du parti communiste cubain. C’était aujourd’hui devenu un objet de luxe, consommé par les hauts dignitaires du libéralisme. Quelle ironie !
Il faut également un peu de temps pour que les personnages prennent de l'épaisseur au fil de courts chapitres qui retracent l'enquête et les interrogatoires : l'inspecteur Auer et Marc Voltenauer prennent leur temps, sans trop se soucier de la vraisemblance, plus attachés à dresser les portraits successifs des différents habitants du village, tour à tour témoins ou suspects. Paradoxalement, ce sont les héros, les enquêteurs autour d'Auer, un peu stéréotypés, qui semblent les moins bien dessinés.
 Tout cela est évidemment un peu long (600 pages !) et l'on regrette que l'auteur n'ait pas cru bon d'en profiter pour consacrer plus que quelques lignes page 614 à un scandale d'état [clic] qui secoua la Suisse bien-pensante : l'affaire de ces [milliers d'enfants placés de force en Suisse jusque dans les années 1980, auxquels la Confédération a rendu hommage postérieurement en leur présentant ses excuses] ... en 2013, une affaire assez similaire à celle de nos enfants de la Creuse qu'un autre livre évoquait récemment.

      L'intrigue :

Au petit matin, dans le temple protestant du village de Gryon, un cadavre est retrouvé en croix sur l'autel, dénudé, poignardé, énucléé, un verset de la Bible sur la poitrine. 
[...] Sur la table de communion, un cadavre était allongé, nu. Les bras étendus étaient perpendiculaires au corps. Les jambes, attachées ensemble à l'aide d'une corde. C'était l'image du Christ crucifié. Un homme. La cinquantaine probablement. Un énorme couteau était planté dans son coeur. Autour de la plaie, du sang séché formait comme un réseau de ruisseaux du haut de la poitrine jusqu'à son sexe. Ses yeux avaient été enlevés. Les orbites ressemblaient à deux trous noirs. A l'extrémité du couteau, une cordelette avec un morceau de papier.
Voilà de quoi bouleverser la population des lieux jusqu'ici tranquilles et mobiliser la police judiciaire de Lausanne : l'inspecteur Andreas Auer a justement élu domicile dans ce village où il vit avec son compagnon journaliste.
La mise en scène pourrait laisser croire que nous sommes tombés [en plein Da Vinci Code] mais plus prosaïquement, le cadavre était celui d'un agent immobilier connu pour quelques vices et pour tremper dans quelques affaires louches. Mais cela ressemble un peu trop à [un homicide digne d'une série télévisée mêlant pouvoir, argent et sexe - les ingrédients indispensables d'un bon audimat] : la vérité sera plus complexe et il faudra fouiller le passé de ce petit village où tout le monde se connait.
[...] La vengeance. Mais l'histoire n'est pas complète. Il y aura une suite. 
- Reste à savoir qui du meurtrier énigmatique ou de l'inspecteur charismatique écrira la fin de l'histoire !,
Il y aura même quelques petits coups de théâtre pour un dénouement intéressant !

Pour celles et ceux qui aiment les montagnes suisses.
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mardi 17 octobre 2023

Les fantômes de Kiev (Cédric Bannel)

[...] C’était terrifiant de se retrouver sur la kill list du Kremlin.

    L'auteur, le livre (512 pages, 2023) :

Les fantômes de Kiev : on se méfiait un peu d'un roman d'espionnage qui semblait surfer sur le conflit en Ukraine, mais on a tout de même décidé de faire confiance à l'un de nos auteurs préférés : Cédric Bannel qui nous a déjà emmené en Afghanistan à plusieurs reprises.
L'auteur poursuit le virage amorcé dans les derniers bouquins sur l'Afghanistan (notamment l'excellent Espion français) avec la mise en scène des aventures d'un espion de l'équipe Sigma de la DGSE du Boulevard Mortier. 

      Le contexte :

Cette fois, nous partons pour l'Europe centrale en Roumanie, en Ukraine, dans le Donbass, sur les traces d'un [complot du Kremlin contre la France. Une opération qui, selon ce qu’il lui avait annoncé, aurait pour nom de code « Ouragan de feu ». Personne n’avait jamais entendu parler de ce truc avant.] Une attaque préparée de longue date parce que [la vengeance du prezident Poutine se mange toujours glacée.] 
[...] Sans l’OTAN, le drapeau russe flotterait déjà sur Kiev. Maintenant, il est acculé, donc il se venge et lâche ses coups. Trois pays sont plus particulièrement dans sa ligne de mire : les États-Unis, le Royaume-Uni et la France. Le premier est loin, le second une île. Nous sommes les plus faciles à frapper. Il va recommencer.

    On aime bien :

❤️ On aime le scénario digne d'un James Bond. La première partie du livre se met en place lentement pour laisser le temps à l'auteur de nous expliquer sa géopolitique et tout ce qu'il a appris sur les services secrets spéciaux des différents pays protagonistes (France, Roumanie, Russie). Puis vient le temps de la course folle à travers le Donbass en guerre et on ne lâche plus le bouquin, véritable page-turner.
❤️ On apprécie le travail de documentation et une intrigue certes romancée, mais assemblée à partir d'événements bien réels : la Norvège a effectivement fourni des missiles français Mistral à l'Ukraine, la prison Isolatsia de sinistre réputation existe bel et bien dans le Donbass, les bidonvilles de Ferentari et Rahova sont bien des plaies ouvertes dans la cité de Bucarest, ...
[...] Même dans les quartiers les plus déshérités de Kaboul, jamais Edgar n’avait été confronté à une telle misère humaine.
[...] Des générations dans des taudis, la banalisation de la pauvreté et de la mendicité, l’absence d’éducation et de formation, après cinquante ans de communisme percutés par trente ans de capitalisme sauvage, avaient créé une trappe sociale dans laquelle beaucoup étaient aspirés. Il en était sorti une version du lumpenprolétariat du XXIe siècle assez proche, finalement, de celle que décrivait Karl Marx à la fin du XIXe.
 Mais tout cela n'a plus le charme exotique des précédentes histoires afghanes auxquelles nous avait habitués Cédric Bannel et le manque d'originalité de cet épisode le place nettement en-dessous du précédent : L'espion français. Reste tout de même un bon thriller d'espionnage raconté par un pro et situé au cœur de l'actualité.

      L'intrigue :

La DGSE est informée de la préparation d'une attaque russe sur le sol français : un attentat digne du 11 septembre. L'agent spécial Edgar est envoyé en Roumanie puis en Ukraine, jusque dans le Donbass, pour retrouver l'informateur mystérieux et déjouer le complot.
Pour couvrir leur implication, les russes n'ont pas hésité à manipuler des islamistes installés en France.
[...] — La France est la cible parfaite, reprit-il. C’est le petit Satan. Elle empêche nos sœurs de s’habiller dignement, leurs filles de porter le voile à l’école. Elle laisse des infidèles caricaturer notre Prophète et insulter notre Livre sacré. Elle permet à des hommes de se marier entre eux, infamie suprême ! Quand des croyants se rebellent contre ces horreurs, elle les envoie croupir en prison au nom d’une prétendue liberté d’expression, qui ne marche que dans un sens. Aujourd’hui, ses troupes sont partout en terre d’islam, au Maghreb, en Afrique, pour lutter contre nos frères en religion.
Des péripéties et un montage très classiques, tout à fait dans les standards (et les clichés ...) de ce type de roman d'espionnage.

Pour celles et ceux qui aiment les espions français.
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dimanche 15 octobre 2023

Le collectionneur de serpents (Jurica Pavicic)

[...] Avez-vous été à la guerre ?

    L'auteur, le livre (177 pages, 2023, 2019 en VO) :

C'est toujours avec autant de plaisir que l'on retrouve Jurica Pavičić, auteur croate né sur la côte Dalmate, à Split en 1965, dans l'une des fédérations de ce qui s'appelait à l'époque la République fédérative socialiste de Yougoslavie avant de devenir la République de Croatie en 1991 lors de l'explosion des Balkans.
Après L'eau rouge et La femme du deuxième étage, voici un recueil de quelques nouvelles : Le collectionneur de serpents.
Cet auteur, découvert récemment avec les premières traductions en français, confirme une fois de plus son indéniable talent de conteur : c'est définitivement une valeur sûre.

    On aime beaucoup :

❤️ On aime la très belle plume de ce conteur désabusé d'histoires tristes, rythmées par les vents des Balkans, le jugo, la bora. Ses bouquins valent vraiment le détour et ses textes elliptiques, tout en non-dits lourds de sens et d'histoire, prennent toute leur mesure dans ce format court de nouvelles.

      L'intrigue :

La nouvelle qui donne son titre au recueil est un court mais efficace portrait de la guerre ordinaire. Non pas les invasions épiques des armées impériales d'antan mais les petites guerres sales qui dévastent aujourd'hui différentes régions du monde. Des guerres absurdes, tragiques et médiocres où l'on enrôle on ne sait trop qui pour combattre on ne sait trop quoi. C'en serait presque risible si ces guerres n'ouvraient autant de blessures aussi profondes dans les populations civiles.
[...] Je me suis rappelé ce qu’avait dit le gros. « Certains d’entre vous ne reviendront pas, mais la majorité oui. Gardez ça en tête. » J’ai gardé ça en tête, tout le temps. La question ultime, la seule qui vaille : tu seras de quel côté quand on fera le compte ?
[...] J’ai regardé ma jambe. Elle était là. Elle était en sang, probablement perforée vu la douleur, mais elle était là. J’ai eu la trouille de ne trouver qu’une masse de chairs déchiquetées et un moignon. J’ai vu ma jambe qui était là, et c’était le plus important.
La nouvelle suivante (Le Tabernacle) est un petit bijou empreint d'une délicate et profonde tristesse dont le style et l'ambiance étranges pourraient rappeler une nouvelle japonaise à la Yoko Ogawa !
Il y a cinq nouvelles, chacune assez longue, souvent en lien avec la frontière conflictuelle avec la Bosnie-Herzégovine.
[...] « Avez-vous été à la guerre ? demanda enfin le médecin. Cela arrive souvent aux personnes qui ont vécu la guerre. » Et Robert s’était tu. Il était resté muet, assis sur son tabouret, torse nu, le regard rivé au sol.
La dernière nouvelle nous ramènera à la guerre, ou plus exactement après la guerre, quand le moment est venu de rendre des comptes.
[...] — Alors, c’est toi qu’ils ont envoyé ? 
— Oui, c’est moi, répondit Robert, et il baissa son pistolet. [...]
— Pourquoi toi ? demanda-t-il. Entre tous les autres, pourquoi c’est toi qu’ils ont envoyé ?

Pour celles et ceux qui aiment les balkans.
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jeudi 12 octobre 2023

Devant Dieu et les hommes (Paul Colize)

[...] Avant de savoir, on ne sait pas.

    L'auteur, le livre (320 pages, 2023) :

Le belge Paul Colize (que l'on connait déjà) continue d'explorer avec finesse et intelligence le passé et l'histoire de son pays.
Devant Dieu et les hommes fut d'abord une pièce de théâtre (un faux procès joué au festival Quai du polar à Lyon en 2021) mais jamais éditée. Il fallut l'insistance de ses pairs pour que Paul Colize en transcrive un roman, en y ajoutant un personnage qui sera notre guide dans le procès : une journaliste, une femme dans un monde d'hommes (nous sommes en 1958).

      Le contexte :

Une sombre tragédie : le 8 août 1956, une explosion et un incendie ravagent la mine de Marcinelle, au Charbonnage du Bois du Cazier. Il n'y aura que quelques rescapés et plus de 260 mineurs y laisseront la vie.
Il y avait une majorité d'italiens parmi ces mineurs : à cette époque, les Charbonnages belges avaient littéralement "acheté" des travailleurs à l'Italie qui peinait à se remettre de la guerre.
[...] L’Italie elle devait donner cinquante mille ouvriers. En échange, la Belgique elle devait donner deux cents kilos de charbon par jour et par homme. Tu sais combien c’est, deux cents kilos de charbon ?

    On aime beaucoup :

❤️ On aime la façon dont Paul Colize nous transporte en 1958 à Charleroi : sa prose toujours très visuelle rend parfaitement compte des mœurs de l'époque, du machisme ambiant, du racisme envers les italiens (avec les bars interdits aux chiens et aux macaronis), des conditions épouvantables d'exploitation des mineurs (un esclavage moderne), des circonstances du drame, ...
❤️ On se passionne pour le procès imaginé par l'auteur, aux allures de polar rythmé par de courts chapitres qui rendent la lecture addictive, ménageant le suspense alors même que pour les deux italiens accusés, le verdict semble plié d'avance.
❤️ On apprécie la place faite aux femmes dans ce récit. Des femmes qui n'avaient pas la vie bien facile à cette époque : qu'elles fuient les armées en guerre, qu'elles essaient de tenir leur foyer aux côtés de leur mineur de mari ou qu'elles tentent de se faire une place dans la rédaction d'un grand journal.

      L'intrigue :

Plutôt que de retracer le long et fastidieux procès de l'accident, Paul Colize imagine un autre procès, celui de deux rescapés, deux mineurs italiens, accusés d'avoir profité du terrible accident pour assassiner leur Kapo, leur porion, un salopard notoire.
Notre guide au tribunal sera une jeune journaliste d'origine polonaise (comme l'auteur) dont les parents ont fuit les armées russes en 1944. 
[...] — Comme vous le savez probablement, le procès de Marcinelle s’ouvrira la semaine prochaine à Charleroi. 
— En effet. 
— J’aimerais que vous couvriez l’événement. 
[...]  Elle l’observa d’un œil amusé. — Vous vous demandez pourquoi je fais appel à vous. 
— Je l’avoue. 
[...] La mission était gratifiante, mais les raisons qui avaient poussé Wellens à la lui confier restaient obscures. Elle ne croyait pas à son discours progressiste. Que cachait cette soudaine ouverture à la diversité ?
Notre guide journaliste est encore tourmentée par de sombres images de son passé (ses parents polonais ont fui les armées russes) : un traumatisme qui va bientôt entrer en résonnance avec le drame du Bois de Cazier.
[...] Des montées d’angoisse continuaient à la tenailler. Les images du passé s’estompaient puis revenaient la tourmenter, telle une marée envahissante.
[...] Ni l’Église ni la psychanalyse ne pourraient venir à son secours. Elle seule pouvait exorciser le passé et se libérer de ses ruminations obsessionnelles.

Pour celles et ceux qui aiment les mineurs.
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Mon billet dans 20 Minutes.

Les naufragés du Wager (David Grann)

[...] Une excellente lecture pour une nuit de mars orageuse.

    L'auteur, le livre (372 pages, 2023) :

Le journaliste et écrivain américain David Grann n'est pas un inconnu : c'était lui l'auteur de la Cité Perdue de Z (adaptée au cinoche) mais on a découvert récemment cet amateur de non-fiction avec un beau récit d'exploration polaire : White darkness.
Et on vient tout juste de lire La note américaine avant la sortie du film de Scorcese (au cinoche : Killers of the flower moon).
Le revoici donc avec l'épopée navale et britannique des Naufragés du Wager, et les droits du livre ont (encore !) été achetés par Scorcese et Di Caprio.
Comme à son habitude, David Grann met un point d'honneur à s'effacer derrière "les faits" de cette non-fiction. Il est même allé en Patagonie pour mieux se rendre compte sur place des conditions (c'était l'été et il était chaudement vêtu !), pour mieux comprendre ce qui pouvait se cacher derrière les mots des archives qu'il a lues. Mais il n'évoquera jamais ce voyage "personnel" dans son livre qu'il ne voulait surtout pas romancer.
David Grann s'est appuyé sur des archives, des documents, des récits et des journaux de bord dont les carnets d'un jeune enseigne de vaisseau, John Byron ... qui sera le grand-père du poète Lord Byron !

    Le contexte :

En 1740, le HMS Wager, vaisseau britannique de sa Majesté avec deux cent cinquante officiers et hommes d’équipage à bord, est envoyé en mission secrète pour piller les cargaisons d’un galion de l’Empire espagnol. 
Au large du cap Horn, le Wager fait naufrage. Une poignée de rescapés survit sur une île désolée au large de la Patagonie mais la situation va vite dégénérer. 
Un premier groupe de vingt-neuf survivants réapparaît au Brésil près de trois cent jours après le naufrage. Trois rescapés de plus atteindront le Brésil trois mois plus tard. 
Commence alors une autre bataille, celle des récits cette fois, afin de sauver son honneur et sa vie face à l’Amirauté et au grand public.

    On aime beaucoup :

❤️ On aime l'humilité et la rigueur de cet auteur, spécialiste de non-fiction, qui s'efface discrètement derrière la réalité de l'histoire mais qui manie la plume avec suffisamment de brio pour nous emporter dans son récit des faits. On apprendra donc ici beaucoup de choses sur la difficile vie à bord ou sur les rivages de la Terre de Feu.
❤️ On est pris par l'aventure de ces marins partis dans des conditions épouvantables, pendant des années autour des mers furieuses, à la poursuite d'un vain trésor de guerre pour la gloire de l'Empire. On est captivé par la résistance de ceux qui eurent la chance d'en réchapper et leur volonté de survie.
❤️ On apprécie aussi les photos, gravures, portraits et cartes qui viennent agrémenter le livre.

      L'intrigue :

Mais que diable sont-ils allés faire dans cette galère ? Tout ça (et tout de même plusieurs centaines de morts parmi les marins) pour aller au bout du monde, au-delà des quarantièmes rugissants, pour attaquer un galion espagnol ?! Certes supposé chargé d'or, mais à quel prix ?!
[...] L'expédition d'Anson, avec son butin tant célébré, s'était soldée par une débâcle. Sur les presque deux mille hommes qui avaient pris la mer, plus de mille trois cents avaient péri - un tribut effarant, même pour un aussi long périple. Et bien que l'amiral soit rentré avec un trésor d'une valeur de quatre cent mille livres, la guerre avait coûté au contribuable quarante-trois millions de livres.
Avec les rigueurs et les privations de l'hiver sur ce rivage inhospitalier, viendra le temps des querelles puis bientôt des mutineries, le temps des bagarres puis bientôt des meurtres.
La dernière partie du bouquin n'est pas la moins intéressante et c'est peut-être ce qui passionna David Grann : lorsque les quelques rescapés reviendront en Angleterre après plusieurs années d'errances et de souffrances, commencera alors la "guerre des récits" où chacun essaiera de raconter l'histoire à son avantage pour éviter la corde lors d'un procès pour mutinerie.
[...] À présent, plusieurs mois après son retour dans son pays [le canonnier] décida de se lancer dans une autre sorte de rébellion, de nature littéraire. Il s'employa à faire publier son journal. Il allait façonner l'opinion publique et, comme il l'avait fait sur l'île, il rallierait les gens à sa cause.
[...] Dès que les journaux populaires et les périodiques furent pleins d'articles palpitants, des éditeurs de livres rivalisèrent pour publier les témoignages des anciens naufragés. Peu après le retour de Cheap en Angleterre, Campbell arriva du Chili à bord d'un autre navire. Il publia son propre récit d'une centaine de pages.
Une Cour Martiale sera bien sûr convoquée en grande pompe dans la baie de Portsmouth mais, visiblement, tout le monde se trouvera bien embarrassé de devoir étaler toute l'expédition et ce désastre au grand jour et l'on trouvera rapidement quelques compromis pour enterrer toute l'affaire. 
[...] Il est impossible de savoir de façon certaine ce qui transpira dans les coulisses, mais l'Amirauté avait certainement de bonnes raisons de vouloir voir cette affaire s'effacer des esprits. Exhumer et examiner l'ensemble des faits incontestables qui s'étaient produits sur l'île - les pillages, les vols, les flagellations, les meurtres - aurait fini par saper un principe fondamental par lequel l'Empire britannique tentait de justifier sa domination d'autres peuples : en l'occurrence, l'affirmation que ses forces impériales et sa civilisation étaient par nature supérieures. Et l'idée que ses officiers étaient des gentilshommes, et non des brutes.
[...] La décision de l'Amirauté de ne pas intenter de poursuite pour mutinerie flagrante sentait la justification embarrassée.
Laissons le mot de la fin à un autre grand auteur des mers, cité par David Grann dans son bouquin :
Dans La Vareuse blanche, son roman paru en 1850, Herman Melville observe [...] qu"ils constituent une excellente lecture pour une nuit de mars orageuse, quand le vent ébranle vos fenêtres à grand bruit et rabat la fumée des cheminées sur le pavé qui pétille sous les gouttes de pluie".

Pour celles et ceux qui aiment les coques de noix.
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mardi 10 octobre 2023

La note américaine (David Grann)

[...] La “Malédiction noire” des Osages.

    L'auteur, le livre (432 pages, 2018, 2017 en VO) :

David Grann se trouve sous les feux des projecteurs en ce moment avec la sortie de son bouquin sur les Naufragés du Wager et puis cette réédition de La note américaine qui coïncide avec la sortie du film de Scorcese, Killers of the flower moon (c'était le titre du bouquin en VO).
Comme il en a coutume, cet auteur de "non-fiction" nous raconte une histoire passionnante, fruit d'une longue enquête fouillée et documentée.

    Le contexte :

Le [péché originel] fondateur des États Unis, un épisode de plus de la déportation et de la spoliation des amérindiens (ici, c'est au tour des Osages) : ce pourrait être l'histoire de l'arroseur arrosé ou plus précisément celle du capitalisme pris à son propre piège.
[...] Au début des années 1870, les Osages avaient été déplacés depuis leurs terres d’origine du Kansas vers une réserve rocailleuse d’Oklahoma, censée être de moindre valeur mais dont on découvrit par la suite qu’elle reposait sur le plus grand gisement pétrolifère des États-Unis.
[...] Pour certains Osages, surtout pour les anciens comme Lizzie, le pétrole était un cadeau empoisonné.
[...] C’est aussi une histoire à peine croyable. Tellement incroyable que l’on se demande au début comment elle a pu avoir lieu au cœur de la modernité et de l’Amérique du XXe siècle.
Mais évidemment, le capitalisme libéral ne pouvait en rester là : on ne pouvait laisser ces sauvages profiter tranquillement de l'aubaine sur laquelle ils avaient été forcés d'établir leur campement. La spoliation systématique allait commencer et tout cela fut parfaitement organisé : mises sous tutelle abusives, extorsions, expropriations, faux en écriture, usurpations d'héritages, corruption des autorités policières et judiciaires, et pour finir, assassinats en règle des propriétaires récalcitrants tout comme des témoins gênants.
Nous sommes dans les années 1920 et l'Amérique a bien du mal à s'affranchir de son far-west sauvage sans foi ni loi.
En coulisses, on assiste à la naissance du FBI dont c'est la première grosse affaire : les hommes de Hoover sont envoyés pallier l'incurie des pouvoirs locaux. Cette police fédérale viendra combler un vide et c'est peut-être là un volet encore plus captivant dans cette passionnante enquête.

    On aime beaucoup :

❤️ Evidemment, on aime le formidable sujet oublié que David Grann a entrepris de sortir des archives poussiéreuses où l'on avait soigneusement enterré cet épisode peu glorieux de l'histoire US.
❤️ On aime l'humilité et la rigueur de cet auteur, spécialiste de non-fiction, qui s'efface derrière la réalité de l'histoire mais qui manie la plume avec suffisamment de brio pour nous emporter dans son récit des faits. 
❤️ On assiste en direct à la naissance de la police étasunienne, bref des institutions et de l'ordre. On reste fasciné par l'impunité dont ont bénéficié les voyous qui avaient entrepris de spolier les amérindiens.

      L'intrigue :

L'or noir des Osages attire toutes les convoitises et les aventuriers qui tentent de les en déposséder par tous les moyens. Jusqu'au meurtre.
[...] Lizzie était décédée d’une manière horrible et contre nature : elle avait été empoisonnée. Et il était aussi certain que les trois morts avaient tous un lien avec le réservoir souterrain d’or noir des Osages.
[...] Le décompte des morts continua à augmenter jusqu’au mois d’août, dépassant la douzaine.
[...] Le nombre de victimes pendant le Règne de la terreur s’élevait officiellement à vingt-quatre, au minimum. Parmi elles, on comptait deux hommes qui avaient prêté main-forte aux enquêteurs.

À la charnière du siècle, le far-west sauvage n'est pas loin : les institutions américaines sont encore un peu à la traîne, ce qui laisse toute latitude aux prévaricateurs. Cupidité et corruption ont force de loi, l'enquête sur les meurtres d'indiens ou de témoins n'avance évidemment pas d'un pouce, même lorsque les Osages font appel à des détectives privés (c'est l'époque des Pinkerton).

[...] La corruption s’était infiltrée dans toutes les institutions du comté.
[...] Les agences de détectives vinrent combler le vide laissé par les shérifs et les départements de police décentralisés, dépourvus de moyens, incompétents et corrompus.
C'est le tout nouveau FBI (qui n'a même pas encore ce nom) avec à sa tête le tout jeune Edgard J. Hoover qui sera chargé d'envoyer en Oklahoma des agents incorruptibles pour dénouer cette sinistre affaire : l'agent spécial Tom White y passera une bonne partie de sa vie.

PS : le titre du film et de l'édition originale du bouquin est tiré d'une légende Osage, [le Xtha-cka Zhi-ga Tze-the, le Tueur des fleurs de Lune].
[...] En avril, des millions de petites fleurs se répandent à travers les Blackjack Hills et les vastes prairies du comté d’Osage en Oklahoma.
[...] En mai, alors que les coyotes hurlent sous une lune pleine et exaspérante, les tiges de ces petites fleurs se brisent, leurs pétales s’éparpillent et sont bientôt enterrés. C’est pour cette raison que les Indiens Osages disent du mois de mai que c’est celui où la lune assassine les fleurs.

Pour celles et ceux qui aiment le FBI et les indiens.
D’autres avis sur Babelio.

lundi 9 octobre 2023

La république des faibles (Gwenaël Bulteau)

[...] On disait : Vive la république !

    L'auteur, le livre (336 pages, 2021) :

D'habitude on n'est pas trop fan des polars dits "historiques", mais celui-ci se passe à Lyon et à une époque pas si lointaine : à la toute fin du XIX°, en pleine affaire Dreyfus, alors que la III° République commence à s'affirmer.
Gwenaël Bulteau, auteur de noires nouvelles, signe là un premier roman plutôt réussi : La république des faibles.

    Le contexte :

Le titre renvoie à un courant de pensée au tournant de ce siècle : quand la République, avec ses idéaux de 1789 et ses Lois, ambitionnait de protéger les faibles (y compris d'eux-mêmes) et, dans le même temps, de se protéger des faibles, en évitant qu'ils ne deviennent des révoltés. De lutter contre la fatalité, le déterminisme, l’hérédité [travaux d'Annie Stora-Lamarre]. 
[...] – On disait : Vive la république ! et le client répondait : Qui prend soin des faibles !

    On aime :

❤️ On aime une galerie de personnages bien campés leur milieu professionnel et domestique : c'est un véritable portrait social de la France de l'époque, quand le mot prolétariat avait encore un sens. 
❤️ On apprécie cette peinture de la France d'en bas de l'échelle, celle des enfants, des femmes, des petites gens, ... 
L'auteur réussit à trouver le ton juste, en évitant pathos et larmes faciles, pour décrire violence et misère ordinaires.
Ces petites gens ne sont guère à la fête et la III° République semble avoir bien du mal à prendre soin des faibles.
Au vu de nos actualités, il n'est pas si évident que nos républiques actuelles aient beaucoup progressé : c'est peut-être là un message, à peine caché, de l'auteur.
❤️ On aime le ton du récit, suffisamment moderne pour notre plaisir actuel, mais qui garde un petit parfum désuet dans le style de l'époque. Le bouquin s'avère très équilibré entre peinture sociale ou politique et intrigue policière.

      L'intrigue :

En ce jour de l'an 1898, un chiffonnier découvre un cadavre décapité dans une décharge à Lyon.
[...] – Un chiffonnier a trouvé un cadavre d’enfant dans la décharge de la Croix-Rousse, commença Soubielle.
[...] – D’après le rapport préliminaire, la victime est un garçon âgé de neuf ou dix ans, dont les vertèbres cervicales ont été sciées à l’aide d’un outil tranchant.
[...] Les priorités sont claires : l’ordre social, la tranquillité publique, la sécurité des commerces. On ne fait pas grand cas de la mort d’un enfant...
[...] Il en fallait des capelines et des képis pour protéger les commerces.
L'auteur nous invite à suivre plusieurs intrigues, histoire d'explorer le contexte de l'époque, quand les fantômes de 1870 n'ont pas encore disparu et que se profilent déjà ceux de la prochaine guerre.
[...] – Les salauds de l’Anti-France, lâcha Dessien. 
– Ah, l’ennemi intérieur ! soupira le flic. 
– Les Juifs, oui, mais pas seulement, les protestants, les étrangers aussi et les internationalistes, tout le syndicat de la trahison acharné à détruire la France.
Avec, en filigrane, un portrait nuancé mais globalement peu flatteur de la police de l'époque (toute ressemblance blablabla).
[...] Ce n’était un secret pour personne que grandissait à l’intérieur de l’institution policière la haine de la république parlementaire et libérale.
[...] Une frange politique nouvelle où s’étaient cristallisés, après l’épisode Boulanger, des valeurs d’ordre et de sécurité ainsi qu’un penchant indéniable pour l’antisémitisme.
Tous les fils de ces intrigues, fort instructives, finiront par se nouer pour un final intéressant.

Pour celles et ceux qui aiment les enfants.
D’autres avis sur Bibliosurf et Babelio.

lundi 2 octobre 2023

Reykjavik (Ragnar Jonasson & Katrin Jakobsdottir)

[...] – Je pense qu’elle est vivante.

    Les auteurs, le livre (415 pages, 2023) :

Dans cette rentrée 2023 foisonnante il y a du très bon
Mais il y a aussi quelques déceptions comme ce Reykjavík, écrit par un duo qui s'annonçait pourtant très accrocheur.
On avait déjà tourné autour des bouquins de Ragnar Jónasson aux titres exotiques : Mörk, Snjór ou Sigló (titres en VF).
Mais le voici pour une partition à quatre mains avec ... la Première Ministre islandaise en personne : Katrín Jakobsdóttir, fan de polars, à qui les années Covid ont laissé un peu de temps libre !

    On n'aime pas trop :

 Les deux complices ont-ils bâclé le job, trop heureux de se retrouver derrière leur clavier ? En tout cas nous voici très déçu par une intrigue bien maigre, des personnages dessinés de façon très inégale et un ton digne d'une littérature jeunesse façon Alice détective.
[...] Elle découvrirait la vérité, quel qu’en soit le prix.
[...] – Quelle aventure ! lança Margrét.
Le seul intérêt du bouquin (et c'est visiblement ce qui avait motivé les deux auteurs) c'est la reconstitution minutieuse de la vie quotidienne en Islande dans les années 80 avec l'urbanisation de Reykjavik (on a toute l'histoire des quartiers à visiter !), l'ouverture de ce petit pays isolé aux nouvelles radios et chaînes de télévisions, les festivités des deux cents ans de la capitale et le sommet qui réunit Gorbatchev et Reagan en 1986.

      L'intrigue :

En 1956, une jeune fille disparait sur la petite île de Videy à quelques encâblures de la capitale où quelques notables festoyaient. 
En 1986, trente ans plus tard, la police n'a toujours pas progressé, les notables n'ont pas été inquiétés, la jeune femme n'a pas été retrouvée. Les parents n'ont jamais fait leur deuil et le flic chargé de l'enquête reste obsédé par ce cold case jamais élucidé.
[...] L’affaire Lára continuait de l’obséder. Il n’abandonnerait pas.
[...] Les recherches de la police n’avaient rien donné. Les plages avaient été inspectées, mais on n’y avait trouvé ni corps échoué, ni bagages. Lára s’était comme évaporée.
[...] Ça fait trente ans que les rouages de cette enquête sont bloqués, trente ans qu’il ne se passe rien, trente ans sans même un nouvel indice.
Un jeune journaliste et sa sœur vont reprendre les investigations à zéro pour déterrer les secrets et les non-dits de l'époque ...
[...] – J’ai vu que tu écrivais sur l’affaire Lára. Tu penses résoudre le mystère ? Tu joues les Colombo islandais ?

Pour celles et ceux qui aiment les Islandais.
D’autres avis sur Bibliosurf et Babelio.
Livre lu grâce à Netgalley et aux éditions de La Martinière.