jeudi 16 octobre 2014

Bloody cocktail (James M. Cain)

La recette du Bloody Joan à la mante (religieuse).

Cette recette de cocktail, on la tient de Jacques (chez qui on peut d'ailleurs nous croiser parfois) : un Bloody Cocktail (en VF, si on peut dire, la VO titrait The cocktail waitress) de James Mallahan Cain, auteur américain du milieu du siècle dernier, connu pour plusieurs polars adaptés au cinéma comme Le facteur sonne toujours deux fois.
Les ingrédients du barman sont plutôt basiques mais la recette toujours réussie : des gars au portefeuille plein de fric, des filles au sex-appeal torride et donc des morts en pagaille.
La variante du Bloody Mary concoctée ici par James M. Cain, c'est le Bloody Joan.
On découvre une Joan (presque) éplorée qui vient tout juste de perdre un affreux jojo de mari qui s'est emplafonné ivre mort au volant d'une bagnole qui n'était pas la sienne. L'affreux jojo battait sa si jeune et si jolie épouse et on n'a guère le temps de s'apitoyer sur son sort.
La pauvre et jolie Joan est obligée de travailler pour subvenir à ses besoins et à ceux de son fils : elle trouve une place de serveuse dans un bar. L'uniforme de la maison lui sied à merveille : la pauvre et jolie Joan a juste un peu de mal à garder sa poitrine à l'intérieur du chemisier et les mains des clients à l'extérieur de sa culotte [non, je ne fantasme pas sur la couverture (d'ailleurs c'était un ebook ... mauvais choix cette fois-ci !) et je n'invente rien : James M. Cain avait une réputation un peu sulfureuse].
Avec son job de serveuse (et son uniforme donc) on se dit que la pauvre et jolie Joan n'aura aucun mal à trouver rapidement un autre mari attentionné.
Et tiens donc, voici que le plus assidu des soupirants se trouve être un vieux milliardaire cardiaque. Je vous ressers un autre Bloody Joan ? Les chips sont offertes par la maison.

[…] Il me portait jusqu’à sa chambre, faisait glisser ma fermeture éclair et couvrait mon cou de baisers. C’est ainsi que, le jour de l’enterrement de mon mari, je couchai avec mon amant pour la deuxième fois.

En dépit de cette intrigue minimaliste (même si on n'a pas retracé ici tous les détails et péripéties) le bouquin fonctionne : c'est écrit à la première personne, la jolie personne de Joan, sous forme de confession. À qui se confie-t-elle ?
Aux flics qui ont enfin trouvé de quoi l'inculper ?
Au lecteur qui voudrait s'ériger en juge impartial ?
Joan n'est-elle qu'une jeune et belle ingénue dont les maris n'ont vraiment pas de bol ?
Ou plutôt une redoutable mante qui n'aurait rien d'une religieuse ?
Faut-il croire tout ce qu'elle nous raconte et surtout que doit-on penser de l'angle sous lequel elle nous dévoile tout cela (si je puis dire) ?
Très vite, chez les flics, tout comme dans la tête du lecteur, il y aura bientôt deux camps ... dont l'un gardera les yeux rivés sur les chemisiers et les shorts de Joan.
Ainsi va le monde selon James M. Cain.

[…] Je pense que vous auriez agi comme moi. Mais vous n’auriez pas fait plus, pas tout ce dont j’ai été accusée, plus tard, dans les journaux.

Ce roman est un inédit posthume : dans sa postface, l'éditeur Charles Ardai, spécialiste du polar hard-boiled, nous raconte comment il a réussi à dénicher les différentes versions non publiées de cette histoire et comment il a tenté de reconstituer un ensemble qui tient la route. La recette réussie d'un polar noir aux saveurs anciennes mais soigneusement dépoussiéré pour notre lecture aujourd'hui.


Pour celles et ceux qui aiment les pin-ups.
D'autres avis sur Babelio et celui de Jacques.



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