Le cancre de la classe polar.
Sujet du Bac, série polar : montez une intrigue où vous accumulerez un maximum de victimes et de serial-killers en faisant référence à vos cours de philo.La dissertation de Mickaël Koudero commence plutôt bien puisqu'elle nous emmène à Lyon, rue de la Guill' pour les intimes. Bien vite on ira à Dijon, puis à Lille et même en Belgique.
Faut dire que l'élève Koudero a pris le sujet au pied de la lettre et qu'il lui faut de l'espace : les cadavres vont s'empiler rapidement.
Je ne vous parle pas du ou des serial-killer(s) mais ce ne sera pas triste non plus. Notons que l'énoncé n'interdisait pas de faire référence à des crimes ayant eu lieu il y a vingt-cinq ans.
L'intrigue est plutôt habilement montée, reconnaissons-le, et dévoilée par petites bribes même si, évidemment avec tous ces cadavres, ça devra finir avec des explications un peu abracadabrantes, mais c'est la loi du genre.
On apprendra même qui est ce fameux Érostrate, auquel faisait référence Jean-Paul Sartre :
« — Je le connais votre type, me dit-il. Il s'appelle Érostrate. Il voulait devenir illustre et il n'a rien trouvé de mieux que de brûler le temple d'Éphèse, une des sept merveilles du monde.Sauf que l'on bute assez vite sur quelques phrases toutes faites dont on se serait bien passé :
— Et comment s'appelait l'architecte de ce temple ?
— Je ne me rappelle plus, confessa-t-il, je crois même qu'on ne sait pas son nom.
— Vraiment ? Et vous vous rappelez le nom d'Érostrate ? Vous voyez qu'il n'avait pas fait un si mauvais calcul. »
[...] Seule une autopsie complète me permettra d’être plus précis.Mais comment peut-on encore écrire ce genre de banalités éculées ?
[...] Un feu de révolte embrasait le corps de Milan.
[...] Le froid saisissait leurs corps. La fatigue criblait leurs êtres.
Bon, passons, mais voilà-t-y pas qu'on trébuche sur une grosse faute de syntaxe, quelques pages plus loin une autre, et encore ! Toutes les deux pages, c'est truffé de bourdes indignes d'un cancre de CM1 ! Un véritable scandale, que l'on pende haut et court ceusses qui ont relu la copie !
Jugez plutôt les perles (on commence en douceur et crescendo) :
[...] Son passage fut porté par des odeurs de chocolats, cafés et croissants.Et on finit en apothéose, la meilleure pour la fin :
[...] Il pourrait avoir un tremblement de terre qu’on ne l’entendrait pas.
[...] Femme de caractère, elle lui en fallait plus pour être dupée par les paroles d’un vieillard.
[...] — À d’autres Adami, on me l’a fait pas.
[...] — Ton quotidien ne la pèse pas trop ?
[...] À l’arrière, la tête posée contre la vitre, Milan se mutilait dans son silence.Évidemment, citer Sartre ne suffit pas et l'élève Koudero est définitivement recalé, faute de français et de goût.
Certes le bouquin semble publié à compte d'auteur et nous est vendu pour une somme modique, mais tout de même Koudero, n'aviez-vous pas au fond de la classe un ou deux camarades capables de relire votre prose et d'en corriger les bourdes les plus flagrantes ?
La modestie des moyens est peut-être louable mais n'autorise pas à écorcher ainsi notre langue, en public et en électronique.
Vous pouvez vous mutiler en silence dans votre coin, sentir si l'odeur du chocolat porte les passages et si vous pouvez obtenir un tremblement de terre. On ne nous la fait pas et il nous en faut plus pour nous duper et nous faire prendre des vessies de brouillon pour des lanternes de roman.
Fin du méchant billet !
Pour celles et ceux qui aiment perdre leur temps.
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