samedi 6 septembre 2008

La cité des jarres (Arnaldur Indridason)

Foutu marécage !

Le cinoche nous annonce l'adaptation à l'écran d'un polar de l'islandais Arnaldur Indridason : La cité des jarres (ce sera Jar City au ciné).
On ne pouvait donc laisser passer cette occasion de ressortir des étagères le bouquin en question, lu il y a maintenant quelques années, avant même ce blog, un des premiers polars d'Indridason, sur les conseils avisés du vendeur de la librairie Compagnie.
Une belle occasion qu'il ne fallait pas manquer : le bouquin est toujours excellent.
Comme dans toutes les histoires mettant en scène l'inspecteur Erlendur, ça démarre loin dans le passé.
Un passé d'où ressurgissent d'affreux drames.
Il y a 40 ans une sordide affaire de viol s'est soldée par une enquête de police bâclée (c'est peu dire), par la naissance d'une petite fille, par la mort de cette petite 4 ans plus tard d'une tumeur au cerveau et finalement par le suicide de la maman 3 ans plus tard.
40 ans après l'affreux bonhomme à l'origine de tout cela est retrouvé assassiné chez lui.
Bon débarras. Ce pourrait être une simple histoire de vengeance tardive bien sûr.
Mais ce serait beaucoup trop simple pour Erlendur, surtout quand l'affreux bonhomme assassiné ... ressurgit !
C'est peut-être un des romans les plus noirs d'Indridason. Il en a pourtant écrit des durs comme sait l'être la terre d'Islande (La femme en vert, par exemple). Mais celui-ci baigne dans une poisse toute polaire.
Il pleut d'ailleurs tout au long du bouquin.

[...] La pluie cinglait la voiture et Erlendur, qui ne suivait pas le bulletin météo, se demanda si elle allait s'arrêter un jour. Peut-être s'agissait-il d'une version abrégée du Déluge, pensa-t-il en lui-même en regardant à travers la fumée bleutée de la cigarette. Il n'était peut-être pas inutile de laver les péchés du genre humain de temps à autre.

Ou encore quelques pages plus loin :

[...] C'était tôt dans la matinée. Dehors le temps était couvert, il tombait une fine bruine et l'obscurité de l'automne se blottissait contre la ville, comme pour confirmer que l'hiver arrivait à toute vitesse, que les jours raccourcissaient encore plus et que le temps se refroidissait. On disait à la radio qu'on n'avait pas connu d'automne aussi humide depuis plusieurs dizaines d'années.

Dans cette sombre ambiance distillée insidieusement au fil des pages, Indridason et son inspecteur fantasment toujours autant sur les disparitions îliennes (sujet récurrent chez cet auteur : comment donc peut-on disparaître sans laisser de trace sur une petite île comme l'Islande ? une question qui taraude l'inspecteur Erlendur depuis son enfance et la disparition de son frère) :

[...] - Au cours des années 70, l'année de la disparition de Grétar, treize personnes ont disparu, précisa Elinborg. Douze dans les années 80, sans compter les hommes morts en mer.
- Treize disparitions, demanda Sigurdur Oli, est-ce que ça ne fait pas un peu beaucoup ? Aucune n'a été élucidée ?
- Elles ne cachent pas obligatoirement un crime, commenta Elinborg. Les gens disparaissent, s'arrangent pour disparaître, souhaitent disparaître, disparaissent.

Ou encore, un peu plus loin :
- Je ne me rappelle aucun exemple de ce genre, dit Erlendur.
- De quel genre ? demanda Sigurdur Oli.
- D'un homme qui refasse surface après toute une vie. Quand quelqu'un disparaît en Islande, c'est pour toujours. Il n'y a jamais personne qui revienne des dizaines d'années plus tard.
Jamais.

Brrrrr... à lire par un sombre jour d'automne, un jour de pluie de préférence !
Pour corser le tout, en marge de son enquête, Erlendur le père divorcé, se retrouve à nouveau aux prises avec sa junkie de fille, Eva Lind.
Ce qui nous vaut de très belles pages. On vous en offre ici deux ou trois qui méritent vraiment le détour et qui donnent également en prime, un aperçu de l'enquête (sans rien dévoiler heureusement).
À noter qu'on vous avait déjà offert un chapitre de L'homme du lac, un autre roman d'Indridason : c'est dire si cet auteur compte parmi nos préférés !
Si avec ces quelques mises en bouche vous n'êtes pas encore convaincus qu'il vous faut partir séance tenante à la découverte de cette fameuse cité des jarres ...
Car oui, elle existe bel et bien cette cité des jarres. Et pour de vrai dans la vraie vie.
Enfin dans la vie islandaise bien sûr.
On trouvera sur le web quelques propos sur cette fameuse cité des jarres islandaise, propos qu'on peut lire avant le film mais qu'il vaut mieux éviter avant le bouquin pour ne pas trop en dévoiler et garder le plaisir du mystère : c'est ici.
Indridason avait déjà eu droit au Best-Of 2006 alors désormais on s'interdit chaque année de le nominer à nouveau mais c'est pas l'envie qui nous manque. Espérons que le film sera à la hauteur du roman. Mais c'est un film réalisé par un islandais, alors ça promet !


Pour celles et ceux qui aiment les îles lointaines, même froides et pluvieuses.
Métailié édite ces 286 pages traduites de l'islandais par Éric Boury.
Herwann en dévoile un peu plus. Émeraude et le Lézard l'ont lu également.

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