Tête de gondole.
On n'avait pas encore eu l'occasion de bloguer ici sur Donna Leon et son commissaire fétiche, Guido Brunetti, le vénitien.Donna Leon, c'est un petit peu la Fred Vargas italienne.
On en reparlera à l'occasion d'un autre polar : De sang et d'ébène, excellent, mais celui-ci est déjà plutôt bien : Dissimulation de preuves.
On y retrouve avec grand plaisir la ville de Venise et le commissaire Brunetti, dans cet ordre ou dans l'autre, peu importe : ils vont de paire.
Un commissaire en apparence tout à fait à l'opposé des flics imbibés, divorcés et désabusés qui peuplent la plupart du temps les étagères de notre rayon polars.
En apparence seulement, car en dessous de l'aimable surface le constat porté sur la société est bien le même.
Guido Brunetti est un bon père de famille, épaulé par Paola, une femme adorable (et bonne cuisinière, on est en Italie quand même !) et affublé de deux ados (presque) adorables également.
Rien de machiste dans tout cela (mais on est en Italie quand même !), juste la vie tranquille, pépère (sérénissime ?), une vie comme en rêvent tous les inspecteurs imbibés, divorcés et désabusés qui peuplent la plupart du temps les étagères de notre rayon polars !
[...] Brunetti décrocha le téléphone pour avertir Paola qu'il ne rentrerait pas déjeuner.Mais les romans de Donna Leon ne comportent pas que des recettes de cuisine et des virées touristiques au fil des canaux de Venise. Ce sont de bons vrais polars avec une intrigue généralement bien ficelée et adossés, comme on les aime, à la réalité sociale ou politique du lieu, en l'occurrence ici : l'Italie corrompue et berlusconienne.
" C'est bien dommage, les enfants sont ici et j'ai prévu ... commença-t-elle.
- Vas-y, dis toujours. Je suis un homme, je peux encaisser le coup.
- Des légumes grillés en entrée, et ensuite du veau au citron et au romarin. "
Brunetti laissa échapper un gémissement théâtral.
" Et un sorbet au citron avec un coulis de figue en dessert. Fait maison.
- C'est vrai ? demanda-t-il tout d'un coup, ou est-ce ta façon de me punir de ne pas rentrer ? "
Le silence de Paola se prolongea. " Tu préfèrerais peut-être que je les amène au McDo ?
- Ce serait de la maltraitance.
- Ce sont des ados, Guido.
- N'empêche ", répliqua-t-il en raccrochant.
[...] Comme si elle avait lu dans son esprit, elle dit : " Les empreintes digitales ", faisant allusion à la prétention du gouvernement, qui s'était vanté de pouvoir parvenir à constituer un fichier des empreintes digitales de tous les citoyens italiens et de tous les résidents du pays d'ici à cinq ans. Brunetti avait éclaté de rire, quand il avait entendu parler de cette proposition; les trains déraillent, les écoles s'effondrent au moindre frémissement de l'écorce terrestre, trois personnes se servent impunément du même passeport - et ils prétendent recueillir plus de cinquante millions d'empreintes digitales !Dans cette police pourrie jusqu'à la moelle, Brunetti a une alliée qui vaut le déplacement en Simplon Orient-Express : la signorina Elettra, hackeuse en talons aiguilles, capable (Brunetti ne veut pas savoir comment et nous non plus) de s'ingérer dans les ordinateurs d'Interpol, les archives du gouvernement et Dieu sait quoi encore !
On penserait presque à Josette, la mamy hackeuse de Fred Vargas (les Vents de Neptune) ... si ce n'est que la comparaison physique n'est décidément pas possible entre la mémé de la banlieue parisienne et l'élégante signorina italienne que l'on soupçonne de faire appel à de multiples amants qui lui sont toujours redevables !
Pour celles et ceux qui aiment les canaux de la Sérénissime.
Points poche édite ces 287 pages qui datent de 2004 en VO et qui sont traduites de l'anglais (Donna Leon est une américaine qui vit à Venise) par William Olivier Desmond.
Bibliotheca en parle.
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