mercredi 3 février 2010

Les pingouins n’ont jamais froid (Andrei Kourkov)

Le manchot et les bandits.

En tout début d'année, on avait eu un petit coup de cœur pour Victor et son pingouin Micha.
A. et T. nous ont donc prêté la suite : Les pingouins n'ont jamais froid, du même ukrainien Andreï Kourkov.
Nous étions impatients de retrouver l'univers kafkaïen de cette Ukraine en complète perdition, l'humour et l'absurde des histoires de Kourkov. Impatients bien sûr des retrouvailles de Victor et de son inénarrable pingouin.
Las, Victor rencontre quelques difficultés pour retrouver son copain qu'il lui faut aller chercher au fin fond de la Tchétchénie.
C'est bien sûr prétexte à de savoureuses descriptions des mœurs et usages en vigueur dans cette univers post-soviétique totalement corrompu et pourri jusqu'à la moelle pour les siècles des siècles.

[...] Chaque pays est une sorte d'immense corps composé de milliers d'organes et de millions de petites cellules qui s'agitent en tout sens, les humains. Plus le corps est grand, moins il est sain. Il faut en permanence le traiter, l'opérer, anesthésier certaines parties en espérant ne jamais avoir besoin de recourir à une anesthésie générale. Cette crainte contribue à multiplier les anesthésies locales.

[...] Notre pays est immense, et les gens capables de penser et d'agir, ou simplement de penser, y sont bien trop rares. Un vrai désert intellectuel ! La quantité de problèmes dépasse largement la quantité d'hommes capables de les résoudre ...

Mais même si les bandits de la mafia russe ne sont pas manchots, le pingouin Micha se fait un peu désirer ...
Reste l'épisode en Tchétchénie, hallucinant, où Victor se laisse embrigadé dans une unité un peu spéciale qui a piraté un oléoduc pour alimenter un four crématoire où l'on brûle les cadavres encombrants : russes, tchétchènes, mafieux, la maison n'est pas regardante sur la marchandise qu'on lui confie. Le jeudi soir, on fait même nocturne avec ristourne sur les prix et les "clients" se bousculent ...

[...] Les jeudis, Siéva rayonnait. En fait, il était toujours content, mais le jeudi, à la veille du vendredi "qui rapportait", il s'animait encore plus. La nuit du jeudi au vendredi était toujours chargée en cadavres, car, suivant un usage instauré par Aza bien avant leur arrivée, c'était tarif réduit pour tous. Victor et Siéva ignoraient le montant de la remise, car les clients traitaient directement avec Aza, mais en tout cas il y avait plus de travail, donc plus de pourboires.

Les autres aventures de Victor (et sur la fin Micha) restent fidèles au ton cynique et désabusé de l'auteur mais sont quand même moins originales que celles du premier tome. Vous l'aurez compris : mieux vaut se concentrer sur le premier épisode.


Pour celles et ceux qui aiment encore les pingouins.
Seuils Points édite en poche ces 398 pages qui datent de 2003 en VO et qui sont traduites du russe par Nathalie Amargier.
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