New polar in France
Excellente découverte que ce premier polar (2013) d'un auteur français : Nicolas Lebel, qui semble avoir une belle plume.
À L'heure des fous, on plonge très vite dans une ambiance à la Fred Vargas (il y a des références moins flatteuses).
Tout d'abord avec une équipe de flics haute en couleurs : une rousse qui héberge un clandestin tchétchène dont elle est tombé amoureuse quand elle l'a interpelé lors d'une manif, un bodybuildé(1) qui récite le code pénal par cœur et qui imagine que son travail de flic l’autorise à rendre justice lui-même, un jeune stagiaire (lyonnais !) blanc-bec qui n'a jamais vu les films d'Audiard et bien sûr le commissaire Mehrlicht qui est l'âme de toute l'équipe et du bouquin.
Un vieux flic bougon, ronchon qui jure comme une troupe de charretiers et fume comme une brigade de pompiers.
[...] — Machiste ? Mais je suis pas machiste pour un rond, vous rigolez ? Vous avez voulu conduire, il y a pas de problème. Elle le regarda.
— Vous transpirez, là, non ?
— Regardez la route, putain ! On va mourir !
Ah oui ! et le portable du commissaire sonne avec des répliques des films d'Audiard déclamées par les voix de B. Blier ou F. Blanche !
[...] C’est une application qui te passe des répliques de films d’Audiard à la place de la sonnerie. Ça change à chaque fois, putain ! Je me marre comme une baleine !
Voilà pour l'ambiance. Autant dire qu'on aura hâte de retrouver cette belle équipe dans un autre épisode !
Pour l'heure (des fous), tout commence avec la découverte du cadavre d'un SDF sur les voies de la Gare de Lyon.
[...] Mehrlicht se prit à penser qu’il n’aimait pas les cadavres de septembre. Ils annonçaient un hiver rigoureux.
Côté intrigue, là encore la comparaison avec Vargas (et notamment les tout récents Temps glaciaires) s'impose puisqu'il est question d'un personnage historique (Napoléon III) et d'une étrange secte de SDF qui ont entrepris de reformer dans le Bois de Vincennes(2) , la Cour des Miracles chère à Victor Hugo.
Pour la petite et la grande histoire, ces ‘fous’ ont découvert une cargaison de fusils Chassepot, sacré clin d'œil d'autodérision de la part Mr. Lebel à son propre patronyme !
Autant dire que Nicolas Lebel/Chassepot ne manque pas d'humour et c'est bien sa plume vive et acérée qui nous accroche à son bouquin (plus que son intrigue, intéressante, mais quand même un peu tarabiscotée).
Les dialogues font mouche à chaque coup ... de fusil.
[...] Dossantos enfila des gants de latex et se pencha à son tour sur le corps.
— Qu’est-ce que tu fous avec des gants en latex, toi ? lui demanda Mehrlicht, éberlué.
— Je regarde Les Experts sur la Une. Tu devrais.
— Il a raison, reprit Carrel. C’est là que j’ai tout appris. Mehrlicht grogna et aspira une bouffée de sa gitane.
— Je regarde pas la télé. Ça rend con. Et puis, si c’est pour finir habillé en latex…
[...] — Cinq coups de couteau, deux au thorax, trois à l’abdomen. À mon avis, mais je peux me tromper…
Mehrlicht, Dossantos et Ménard se tournèrent vers lui.
— Quoi ? demanda Mehrlicht.
— C’est criminel !
— T’es con ! J’ai cru que t’avais le nom du coupable, moi, rétorqua Mehrlicht, feignant la déception.
Et puis cette histoire très ancrée dans la réalité sociale de notre pays en général et de Paris en particulier(3) nous force, nous qui enjambons pratiquement les SDF sur les trottoirs de la capitale, à ouvrir les yeux sur le sous-monde en train de se créer comme l'imaginaient les romans de SF de notre jeunesse (de SF à SDF ?).
Le deuxième épisode est déjà sorti : Le jour des morts. Il y est question de morts bleutées en série (décidément, les références à Dame Vargas sont bien là). On en reparle évidemment bientôt, on espère pour un coup de cœur.
Une fois n'est pas coutume : saluons les éditions Marabout qui ont actualisé le prix du eBook en-dessous de celui de la sortie en poche de ce bouquin. Il y a au moins un éditeur intelligent en France.
(1) - Nicolas Lebel est amateur de sports de combat
(2) - et oui, nos bois sont désormais très habités, véridique
(3) - Nicolas Lebel est parisien
Pour celles et ceux qui aiment Michel Audiard et Victor Hugo.
L'avis de Jacques et une interview de Nicolas Lebel.
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