samedi 8 juin 2019

De bonnes raisons de mourir (Morgan Audic)

[...] – C’est vraiment le pire endroit où mourir.

Il y a pas mal de bonnes raisons de lire ce très bon polar De bonnes raisons de mourir du breton Morgan Audic, qui est fasciné comme nous tous par cet événement si proche et si redouté dont, plus de trente ans après, on explore toujours les traces gravées durablement dans les esprits de tous et les chairs de quelques uns.
Après la BD reportage (Un printemps à Tchernobyl), après le roman journalistique (La Supplication), après l'introspection autobiographie (86 année blanche), voici donc le polar.
Tous ouvrages très remarquables, à la hauteur de la gravité des lieux et des événements.
Comme il est d’usage au rayon polar, tout commence par un cadavre : celui d’un fils de notable russe, torturé et mutilé, accroché sur la façade d’un immeuble de Pripiat, la ville désertée près de la centrale.
Un meurtre qui semble faire écho à un cold case non élucidé qui se serait déroulé trente ans plus tôt, le jour même de l’explosion.
[...] Pripiat, une ville fantôme abandonnée depuis 1986 à cause de l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl. 
Morgan Audic nous évite de justesse le polar dépliant touristique, façon Tchernobyl comme si vous y étiez, et réussit à placer la barre assez haut.
L’un des chapitres s’intitule d’ailleurs ‘Nouvelles de la fin de monde’.
Le décor est planté : bien sûr la fin de l’innocence nucléaire (un hiver nucléaire que certains croyaient réservé à l’impéritie communiste jusqu’à ce que les insoupçonnables nippons soient également rattrapés à Fukushima), la fin du monde soviétique (Pripiat n’est plus en URSS), la fin même de cette Ukraine dont les sécessionnistes pro-russes grignotent la région du Donbass (à Donetsk nous sommes en pleine guerre civile), et la fin tout court pour quelques uns des personnages dont les derniers jours s’écoulent au rythme trop rapide du crépitement des compteurs Geiger.
[...] Les gens veulent croire que c’est du passé, Tchernobyl. Mais toutes les victimes de la catastrophe ne sont pas nées. 
La première partie du bouquin laisse se développer lentement mais sûrement une intrigue policière solide mais Audic enchaînera ensuite les twists rocambolesques et les coups de théâtre avec un peu trop de facilité.
Un auteur (français !) à suivre de près et surtout un documentaire passionnant à lire au moment même où les autorités françaises élargissent le périmètre de sécurité [clic] autour de nos centrales.
On peut aussi découvrir Slavutitch, la ville surréaliste construite après l’explosion, à quelques dizaines de kilomètres de là, avec ce petit article de Libé.

Pour celles et ceux qui aiment se faire peur.
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