vendredi 21 mai 2010

Le cercueil de pierre (Kjel Eriksson)

Il est pas beau le labo.

Malgré quelques valeurs sûres comme Jo Nesbo ou Henning Mankell (et encore, j'oublie l'islandais Indridason), on commence à être un peu écœuré de la déferlante nordique qui envahit le rayon polars, ça frise l'indigestion de ragoût d'élan aux airelles.
Alors quoi, un de plus ?
Et bien oui, voici le suédois Kjel Eriksson !
Ce nouveau venu (premières traductions en 2007) vaut le détour par Uppsala, la quasi-banlieue de Stockholm(1) .
L'ambiance y est un peu moins sombre que dans la ville d'Ystad vue par Mankell.
Et puis, même si l'auteur ne prend pas de "e", le personnage central est une femme, une fliquette, Ann Lindell, dont la vie privée occupe une bonne partie du bouquin.
Ça change un peu des mecs désabusés et imbibés(2) qui hantent habituellement les commissariats de Suède (et d'ailleurs) !
Autant de bonnes raisons de se laisser emporter une nouvelle fois par une enquête scandinave de plus.
D'autant qu'avec cet épisode on a même droit en prime à une petite excursion à ... Malaga ! 
Car il est question ici d'internationalisation, de crime en col blanc, d'expérimentations pharmaceutiques louches et de transactions financières douteuses ... le crime n'a pas de frontières, en tout cas pas entre la Suède et l'Espagne.
Un polar bien mené, qui démarre sur les chapeaux de roues(3) et qui nous emmène explorer un univers un peu différent de ce que l'on a l'habitude de côtoyer.

- Vous semblez avoir dissimulé quelques millions, vous vous livrez à des expériences sur des animaux que les activistes de la défense des animaux - et quelques autres peut-être - qualifient de mauvais traitements, le patron de votre service de Recherches écrase sa femme avant de suicider, et vous trouvez étrange que les gens se posent des questions ? Qu'est-ce qui se passe, chez MedForsk, au juste ?

Le tout est plutôt de bonne facture, comme on dit. Même si, malgré l'intérêt de l'enquête au féminin, on reste encore loin de la grande littérature d'un Mankell ou de l'intimisme d'un Indridason.
Mais cela se lit sans déplaisir aucun.
Un polar situé à mi-chemin, non pas entre Uppsala et Malaga mais plutôt entre la Suède de Mankell et la Venise de Donna Leon.
Une phrase terrible clôture le bouquin :

[...] À moins que ce ne soit comme le pays du Suédois : une terre glacée et inféconde ?

Le jugement sur la Suède d'aujourd'hui, sur le monde d'aujourd'hui, est sans appel.

(1) : j'espère qu'il n'y a pas beaucoup de suédois qui lisent ce blog : ce doit être le genre de raccourcis à la noix qui vous font haïr de toute une région du globe ...
(2) : quoique notre nouvelle amie Ann Lindell ne dédaigne pas un petit verre de rouge le soir après le boulot ... mais ces dames vont encore dire que c'est parce que c'est un mec qui écrit, pfff !
(3) : très mauvais jeu de mots auquel je n'ai pas pu résister : page 12, une mère et sa fille se font écrabouillées par une voiture ... ça commence fort !


Pour celles et ceux qui aiment les fliquettes.
C'est Babel Noir qui édite ces 420 pages parues en 2001 en VO et qui sont traduites du suédois par Philippe Bouquet.

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