lundi 2 décembre 2013

Dix rêves de pierre (Blandine Le Callet)


RIP.

Le sujet était pour le moins intrigant : Blandine Le Callet compose dix petites nouvelles à partir de dix épitaphes relevées au hasard de ses pérégrinations, sur dix pierres tombales : Dix rêves de pierre.
[…] L’idée de ce recueil m’est venue il a plus de vingt ans, lors d’une visite au Musée gallo-romain de Lyon au cours de laquelle je suis tombée en arrêt devant l’épitaphe de Blandinia Martiola.
C’est d’abord la coïncidence entre son prénom et le mien qui a attiré mon attention; puis j’ai été frappée par le caractère émouvant de ces lignes qui, au-delà des siècles, évoquaient le chagrin d’un homme à la disparition de sa très jeune épouse.
J’ai recopié l’épitaphe sur une page arrachée à mon agenda, et me suis prise à imaginer …
L’astuce consiste à nous raconter une petite histoire (dont on devine rapidement que l’un ou l’autre des protagonistes est mort et enterré depuis belle lurette) et de conclure par la fameuse épitaphe, comme si c’était la morale de l’histoire.
Les premières nouvelles sont un peu déroutantes, presque décevantes qui nous emmènent dans le passé, dans l’antiquité : cela nous éloigne et ces premières histoires nous restent un peu étrangères, le temps ancien ajoute une distance supplémentaire à celle déjà présente de la mort.
Mais au fil des nouvelles à lire dans un ordre chronologique, tout cela se resserre autour de notre siècle et autour du personnage même de l’auteure : la dernière nouvelle est même autobiographique et se conclut par une étrange pirouette que la postface (l’instructive postface) de Blandine Le Callet nous garantit authentique.
À mi parcours, la nouvelle des hortensias (celle des âmes d’enfants perdus dans les limbes) vaut à elle seule la visite du cimetière(1).
Rien de macabre dans tout cela : Blandine Le Callet entreprend seulement d’imaginer des histoires et des secrets perdus à jamais.
[…] On a beau savoir que c’est pour bientôt, au bout du compte, on n’est jamais prêt quand arrive le moment.
Quand les vivants sont là, il y a des sujets qu’on évite d’évoquer, des questions qu’on évite de poser, pour ne pas froisser, pour ne pas blesser. Mais quand les chers disparus nous ont quitté, il est trop tard et ils ont emporté avec eux ces secrets, ces non-dits …
Alors il faut bien quelqu’un pour sortir tout cela de l’oubli et du néant, à partir de quelques mots gravés sur la pierre. C’est le travail entrepris par Blandine Le Callet, à sa façon, pour une dizaine de chers disparus.
(1) - dans son excellente postface à garder pour la fin comme son nom l’indique, Blandine Le Callet nous indique que l’Église aura attendu 2007 (oui : 2007 !) pour refermer le chapitre des limbes … L’obscur Moyen-Âge aura duré vraiment très longtemps.


Pour celles et ceux qui aiment les cimetières.
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