C’est un tabou qui tombe, un pan de l’histoire de l’Espagne qui est dévoilé.
On ne connaissait pas encore cet auteur marseillais, prolixe et engagé qu'est Maurice Gouiran, et l'on a donc entrepris de faire sa connaissance avec son dernier bouquin : L'hiver des enfants volés.Les enfants volés dont il est question ne sont pas ceux de l'Argentine sur lesquels on a beaucoup lu [1] [2] [3], mais presque, puisqu'il s'agit ici des bébés espagnols volés par Franco et sa clique de 'bonnes' sœurs : l'Argentine avait un lourd héritage hispanique né de la collusion entre une dictature fascisante et une église fascinée.
Mais revenons de ce côté-ci de l'Atlantique et à l'enquête du journaliste Clovis Narigou. Non seulement le nom du héros est l'anagramme de celui de l'auteur mais le récit est à la première personne et s'adresse parfois au lecteur : Maurice Gouiran s'engage !
Évacuons tout de suite les petites agaceries et irritations face à ces écrivains qui n'ont pas encore compris qu'il faut gratter, gratter jusqu'à l'os pour épurer et ne garder que la substantifique moelle après avoir éliminé tout le gras indigeste.
Ainsi on aurait aimé éviter les pages touristiques à Barcelone et Madrid, l'auteur lui-même plaide coupable :
[...] J’ai pensé que j’aurais pu faire financer mon voyage par Le Petit Futé ou par Le Guide du routard, car mon enquête virait au vrai périple touristique !On aurait aimé aussi échapper aux évitables réflexions sur le monde de la branchitude techno :
[...] C’est vrai que c’est hyper pratique ce système de cloud, surtout pour des gars, comme les journalistes, qui se baladent continuellement. On n’a plus besoin d’emporter dans ses valoches un netbook, un CD-Rom ou une clé USB.Visiblement, Gouiran nous prend pour des demeurés qui ne sont jamais allés outre-Pyrénées et qui utilisent encore des disquettes de cinq pouces un quart (et pourtant je suis né avant lui !).
Bon ça, c'est dit.
Mais revenons à nos moutons noirs et suivons le marseillais Gouiran/Narigou parti en Catalogne pour enquêter sur la disparition d'un ami journaliste. Son ami François qui semble avoir voulu fourrer son nez là où il ne fallait pas.
Tout passé n'est pas bon à déterrer quand, aujourd'hui encore et toujours, certains redoublent d'efforts pour le faire oublier.
Marchant dans ses pas le long des ramblas catalanes, Gouiran/Narigou nous dévoile les dessous nauséabonds de l'Histoire ...
Et pas seulement les pages les plus sombres de l'Espagne puisqu'il sera également question d'autres enfants volés, ceux des Lebensborn nazis (rappelez vous le film de l'an passé : D'une vie à l'autre). Un autre secret tout aussi bien gardé puisqu'il faudra attendre la fin des années 80 pour que soit révélé le secret de ces Lebensborn et que ce n'est qu'en 2004 [clic] et 2009 [clic] que la presse évoquera le seul centre français !
Maurice Gouiran semble hésiter entre la thèse journalistique et l'enquête à la Rouletabille. Sa prose parfois précise mais souvent maladroite ne nous laissera pas un souvenir impérissable : dommage parce que la conclusion de ces enquêtes est plutôt réussie et nous laisse entrevoir le beau roman que nous aurions pu avoir.
Mais reconnaissons lui le mérite de soulever la boue qui recouvre, encore de nos jours, ces passés honteux : des enfants volés peuvent en cacher d'autres ...
[...] J’avais en mémoire ces photographies en noir et blanc sur lesquelles les notables de l’Église et les prêtres posaient, bras tendu et main ouverte, parfois armés de fusils, auprès des militaires putschistes. Chez eux, le salut phalangiste avait trop souvent remplacé le signe de croix.Après Jean-Paul II en 2001, Benoit XVI béatifiait 500 religieux nationalistes espagnols en 2007. En 2012, sœur María Gómez Valbuena était mise en accusation avant de décéder en 2013. En 2013, cinq cent autres religieux furent béatifiés par l'église espagnole, avec la bienveillance du pape François.
Tout passé n'est pas bon à déterrer quand, aujourd'hui encore et toujours, certains redoublent d'efforts pour le faire oublier.
[...] Ainsi, on volait des gosses, on les revendait pour le prix d’un appartement, et en plus il aurait fallu remercier les curés et les bonnes sœurs sous prétexte qu’ils rendaient service à tout le monde : au gosse volé, à la mère spoliée, aux parents adoptants ! C’était une conception assez particulière de la charité chrétienne.Le bouquin est plutôt bien construit qui entremêle la recherche de l'ami journaliste mystérieusement disparu, l'enquête qui le conduisait sur les traces de bébés volés, les recherches que l'ami François menait sur son propre passé, ...
Marchant dans ses pas le long des ramblas catalanes, Gouiran/Narigou nous dévoile les dessous nauséabonds de l'Histoire ...
Et pas seulement les pages les plus sombres de l'Espagne puisqu'il sera également question d'autres enfants volés, ceux des Lebensborn nazis (rappelez vous le film de l'an passé : D'une vie à l'autre). Un autre secret tout aussi bien gardé puisqu'il faudra attendre la fin des années 80 pour que soit révélé le secret de ces Lebensborn et que ce n'est qu'en 2004 [clic] et 2009 [clic] que la presse évoquera le seul centre français !
Maurice Gouiran semble hésiter entre la thèse journalistique et l'enquête à la Rouletabille. Sa prose parfois précise mais souvent maladroite ne nous laissera pas un souvenir impérissable : dommage parce que la conclusion de ces enquêtes est plutôt réussie et nous laisse entrevoir le beau roman que nous aurions pu avoir.
Mais reconnaissons lui le mérite de soulever la boue qui recouvre, encore de nos jours, ces passés honteux : des enfants volés peuvent en cacher d'autres ...
Pour celles et ceux qui aiment les trouble-fêtes et pas les curés.
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