dimanche 1 novembre 2009

Ceux qui vont mourir te saluent (Fred Vargas)

Tous les chemins mènent à Rome.

L'autre dimanche, soirée Fred Vargas. La voisine du 4° avait décidé de faire du vide dans son grenier et mettait à disposition des occupants de l'immeuble deux ou trois cartons de bouquins, façon bourse aux livres, servez-vous. On y a pioché quelques Fred Vargas, des vieux qu'on relira avec plaisir et des vieux qu'on n'avait pas encore eu le plaisir de lire.
MAM tape évidemment au hasard dans la pile (pfff...) mais BMR commence sagement par le début avec Ceux qui vont mourir te saluent l'un de ses tout premiers romans (1994).
Nous voici à Rome à la poursuite de dessins de Michel-Ange mystérieusement disparus de la Vaticane, la grande bibliothèque locale.

[...] - Tu es donc en cheville avec le banditisme romain ? Tu trafiques ?
- Mais non. C'est ma valise qui trafique. Quand j'arrive à Rome, il n'y a rien dedans. Quand je repars, il y a des tas de trucs inouïs. Qu'est-ce que je peux y faire ? Elle vit sa vie de valise, cette valise. Si ça lui plait de trimbaler des tas de bricoles, c'est son affaire, je ne vais pas m'en mêler. On ne quitte pas une valise sous prétexte qu'elle prend de temps en temps son indépendance.

Sans le soutien qui viendra plus tard du commissaire Adamsberg, Fred Vargas peine un peu pendant quelques chapitres pour mettre en place ses personnages.
On se fait l'effet d'une soirée mondaine où, l'air un peu emprunté, on salue d'autres invités inconnus : un trio de fils à papa oisifs qui traînent dans les études d'art et surtout les fêtes chic et décadentes de Rome (ils ont pris les noms des empereurs romains, Néron, Claude et Tibère). La mère de l'un d'eux, femme fatale et fantasque. Un inspecteur italien charmeur et bavard. Un monseigneur papiste qui semble s'arranger facilement de la conscience divine. Un missi dominici au caractère odieux envoyé par un ministère parisien pour étouffer l'affaire.

[...] Gabriella resta les yeux dans le vide, tournant une cigarette entre ses doigts.
- Tu penses à Richard Valence ? demanda Lorenzo.
Tu te dis qu'il a malgré tout quelque chose d'irrésistible et tu te demandes ce que ça pourrait bien être ?
- Lorenzo, tu es exactement le genre de curé que j'adore. On a à peine le temps de commencer à penser que c'est déjà déchiffré, formulé, disposé en petits carrés sur la table. Il devait y avoir la queue à ton confessionnal.
L'évêque rit.

Mais une fois que l'on a fait connaissance avec tous les invités, le spectacle peu commencer.
Fred Vargas démontre une profonde et humaine tendresse pour ses personnages et c'est forcément communicatif.
Ce presque premier roman nous permet de découvrir la construction Vargas de manière quasi transparente : l'auteure s'intéresse avant toute chose à ses personnages. Des figures un peu déjantées, des tronches décalées, des personnalités insolites. Une fois ceux-ci en place et connus du lecteur, la machine se met en marche et nous pond du dialogue poétique et surréaliste, en veux-tu en voilà.
Au fil des chapitres elle sème de ci de là, le ton badin : une phrase innocente ici, un personnage anodin par là, une action insignifiante plus loin, ...
Et puis, au détour d'une page,  vient le moment espiègle de la récolte : ça fait plop, plop, et l'on jubile de voir comment elle détourne et assemble toutes les pièces pour dessiner un surprenant puzzle.
À cela il faut ajouter que Fred Vargas ne se prend pas au sérieux et ne nous prend pas la tête. Ses bouquins se lisent d'une traite comme des histoires gentilles et sympathiques où les méchants ne sont jamais très méchants et où tout est bien qui finit bien.
Pour le seul plaisir de la langue et de la lecture.


Pour celles et ceux qui aiment les bibliothèques et les histoires de famille.
J'ai lu édite ces 190 pages qui datent de 1994.
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