[...] Une terre d’ombre et rien d’autre, lui avait dit sa mère.
On avait mis Un pied au paradis avec, il y a trois ans, le premier roman de Ron Rash.Non pas que l'histoire était bien gaie, le paradis n'avait rien de bien réjouissant, mais c'était déjà le coup de cœur pour une plume très sûre et un excellent nature-writing.
On replonge donc sans aucune appréhension dans Une terre d'ombre.
[...] Une terre d’ombre et rien d’autre, lui avait dit sa mère, qui soutenait qu’il n’y avait pas d’endroit plus lugubre dans toute la chaîne des Blue Ridge.Comme dans le bouquin précédent, il est encore question ici (du moins pendant quelques pages) d'une vallée qui va être inondée (ce qui semble être l'une des obsessions de Ron Rash comme les disparitions islandaises le sont pour Indridason), le temps de faire surgir la vérité du fonds d'un puits et de nous plonger pour le reste du bouquin au début du siècle, lorsque le pays se remet à peine de la Guerre de Sécession et vient déjà de replonger dans la Grande Guerre.
Laurel et son frère Hank exploitent tant bien que mal leurs terres d'ombre dans cette vallée sinistre que le soleil ne vient pratiquement jamais visiter. Laurel est affligée d'une tâche de naissance que les superstitions ont tôt fait d'associer au mauvais œil. D'ailleurs comme preuve, le frère est revenu manchot des tranchées.
Un vagabond va venir troubler leur quotidien peu réjouissant. Lentement mais sûrement le drame se noue. L'inconnu est muet mais joue du Brahms avec sa flûte.
On va découvrir avec cette histoire, un pan méconnu de l'Histoire américaine, leur engagement dans la Grande Guerre (celle de 14), leur haine des allemands (savamment entretenue), la conscription, la mobilisation, ...
[...] Quand la mère de Laurel était morte, son père avait voilé le miroir et laissé la pendule Franklin s’arrêter pour figer les aiguilles sur le X et le II, et indiquer l’heure de la mort. Deux mois avaient passé avant qu’il tourne de nouveau la clé métallique. Mais les aiguilles étaient restées si longtemps à la même place qu’elles avaient paru incapables de se débloquer et étaient donc restées sur le X et le II.L'inconnu venu troubler la fausse routine de ces contrées va peut-être s'avérer aussi diabolique que le joueur de flûte de Hamelin.
Un bouquin très noir évidemment, aussi sombre que cette vallée, un bouquin profondément ancré dans ces terres et leur Histoire. Ron Rash est un formidable conteur.
Il connait désormais le succès chez nous et les traductions se sont faites plus nombreuses.
Pour celles et ceux qui aiment les joueurs de flûte.
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