[...] Il n’y a eu aucun survivant.
Surprenant (et épouvantable) roman du chinois Ken Liu qui vit aux US.L'homme qui mit fin à l'Histoire débute comme un roman de SF ou d'anticipation.
La vue que l'on a des étoiles le soir est une photo partie il y a des milliers d'années, le temps qu'il faut à la lumière pour arriver jusqu'à nous. Ce que l'on voit est donc une très ancienne étoile, qui a beaucoup changé ou même disparu depuis.
Ken Liu imagine un procédé scientifique permettant d'avoir ce même recul spatio-temporel et donc d'aller "voir" notre Histoire, notre passé.
Mais oublions bien vite ce côté "SF", à mi-chemin entre physique et poésie, car si Ken Liu a entrepris de nous faire voyager dans le temps c'est pour nous emmener dans les années 30 en Mandchourie, lorsque les japonais avaient envahi la Chine.
[...] En 1931, près de Shenyang, ici en Mandchourie, éclatait la Seconde Guerre sino-japonaise. Pour les Chinois, il s’agissait du début de la Seconde Guerre mondiale, plus d’une décennie avant l’implication des États-Unis.
Près de Harbin, les nippons avaient installé la sinistre Unité 731, surnommée l’Auschwitz d’Asie, où se déroulaient toutes sortes d'expérimentations sur des cobayes chinois : vivisections, amputations, armes bactériologiques et chimiques, tests de l'endurance humaine, tortures diverses et variées pour faire avancer la recherche et médecine, la science et le progrès.
[...] Les historiens estiment qu’entre deux et cinq cent mille Chinois, presque tous des civils, ont été tués par les armes bactériologiques et chimiques mises au point ici et dans des laboratoires annexes : anthrax, choléra, peste bubonique.[...] MacArthur, commandant en chef des forces Alliées, a préservé les membres de l’Unité 731 de toute poursuite judiciaire pour crimes de guerre afin de récupérer les résultats de leurs expériences et de soustraire lesdites données à l’Union Soviétique.[...] Le gouvernement japonais n’a jamais reconnu les actes de l’Unité 731 et ne s’en est jamais excusé.
Heureusement le bouquin ne fait qu'une centaine de pages et les descriptions horrifiques sont courtes et peu nombreuses : Ken Liu a l'intelligence de ne pas trop en rajouter, c'est au-delà des mots.
Au-delà du nécessaire rappel de ces terribles faits historiques, l'auteur s'essaye également à philosopher sur notre approche de l'Histoire (c'est d'ailleurs le titre du bouquin) et c'est plutôt bien vu, parfois un peu too much, mais en tout cas cela soulève des questions passionnantes.
En effet, le regard que l'on obtient grâce à son procédé est instantané et unique : une fois réalisé, le "voyage dans le temps" ne peut plus être renouvelé. L'image a été consommée.
[...] Un des paradoxes cruciaux de l’archéologie, c’est que, pour fouiller un site afin de l’étudier, il faut le détruire.
À noter : la maison d'édition Le Bélial propose ce petit bouquin pour un prix modique en numérique et sans DRM pour pouvoir le prêter à ses amis. Il existe donc des éditeurs intelligents.
Pour celles et ceux qui aiment savoir.
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