samedi 5 décembre 2020

Une histoire birmane (George Orwell)

[...] Tout est une question de prestige.

Cette année policière et pandémique aura été propice à la (re)lecture de quelques grands auteurs classiques comme Camus ou ici George Orwell.
Après les incontournables comme 1984 ou La ferme des animaux, on s'attaque à un tout autre bouquin, un des premiers romans de l'auteur : Une histoire birmane (Burmese days en VO).
Eric Arthur Blair (le vrai nom d'Orwell) est né aux Indes britanniques et il arrivera à Katha en Birmanie dans les années 1920 en tant qu'officier de la police impériale, à une époque où l'Empire se fissure de toutes parts.
Ce roman est évidemment tiré de cette immersion dans le camp des colons de la couronne où la suffisance et la médiocrité le disputent au racisme, une expérience qui le marquera beaucoup.
La saveur épicée du récit vient de l'amitié entre un entrepreneur anglais, Mr. Flory (qui tient des propos 'bolcheviques' selon ses pairs !) et un médecin indien.
[...] C'était le monde renversé, car l'Anglais se montrait violemment anti-anglais et l'Indien farouchement loyaliste.
Les propos de Flory-Orwell sur ses compatriotes sont en effet sans appel.
[...] - Quel mensonge , mon cher ami ?
- Mais, voyons, celui qui consiste à prétendre que nous sommes ici pour le plus grand bien de nos frères de couleur alors que nous sommes ici pour les dépouiller, un point c'est tout.
[...] C'est pourtant très simple. Le fonctionnaire maintient le Birman à terre tandis que l'homme d'affaires lui fait les poches.
[...] L'Empire britannique est tout bonnement un moyen de donner le monopole du commerce aux Anglais.
Le charme de ce roman, façon 'un anglais sous les tropiques', tient aussi dans cette description bienveillante et presque naïve de la vie quotidienne aux Indes qui témoigne de l'attrait de ce pays aux yeux d'Orwell.
[...] Les Birmans, en prenant de l'âge, ne deviennent pas flasques et ventrus à l'instar des Blancs : ils s'arrondissent de partout à la fois, tel un fruit en train de mûrir.
[...] J'aimerais que vous veniez dans la véranda voir mes orchidées. J'en ai à vous montrer qui ressemblent à des clochettes d'or - on dirait vraiment de l'or. Et elles ont un parfum de miel, presque trop violent. C'est à peu près le seul mérite de ce sale pays : il est bon pour les fleurs. J'espère que vous aimez le jardinage ? C'est notre grande consolation ici.
Il y a même un suspens quasi policier lorsqu'un vieux notable birman corrompu se met à intriguer et comploter au sein du microcosme qu'est la petite ville de garnison.
Et cette petite fable laissera finalement un arrière-goût très amer.

Pour celles et ceux qui aiment les indigènes.
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