[...] Elle avait braqué des banques, posé des bombes.
Encore de l'histoire vraie, mise en page par une journaliste.
Vanessa Schneider est un peu trop jeune pour se plonger par nostalgie dans les turbulences post-soixante-huitardes des années 80, mais papa était quand même un lacanien maoïste et ça doit laisser des traces.
Elle nous invite donc à suivre le parcours de La fille de Deauville, Joëlle Aubron, une jeune fille de petite bourgeoisie, un peu rebelle mais que rien non plus ne prédisposait à intégrer dans les années 80, le noyau dur d'Action Directe, le groupe terroriste anticapitaliste issu des GARI antifranquistes, version franchouillarde des Brigate Rosse ou de la Rote Armee Fraktion, mais qui manqua quelque peu son rendez-vous avec l'Histoire, coincé quelques années trop tard (Aldo Moro c'était en 78) entre le nouveau pouvoir socialiste et l'arrivée des terroristes palestiniens.
[...] Si une organisation avait encore les moyens de frapper, en ce début des années 80, alors que les copains d’avant rappliquaient ventre à terre dans les arcanes du pouvoir socialiste, c’était bien AD, aussi famélique que soit l’organisation.[...] À côté de leurs copains allemands, espagnols et italiens, les gauchistes hexagonaux étaient gentillets.[...] Les combattants palestiniens démontraient chaque jour leur puissance et saturaient les médias de sang et de cris. Pendant ce temps, AD braquait des banques et posait des bombes, de nuit, dans des bureaux vides. La police ne se déplaçait même plus.[...] Plus leur influence déclinait, plus les terroristes se durcissaient.
[...] Les derniers articles de presse parlaient d’eux comme d’une bande de ratés manipulés par les camarades allemands de la RAF. On ne les prenait pas au sérieux.
Après une longue série de braquages et de mitraillages de symboles du pouvoir, Joëlle Aubron monte en première ligne en 1986 pour assassiner Georges Besse, le patron de Renault, un peu en mémoire de Pierre Overney abattu en 72. L'apogée éphémère de sa carrière de terroriste rouge.
[...] Elle avait braqué des banques, posé des bombes, mis en joue des passants, tiré sur des flics, elle avait tué.
[...] Dans la nuit du 19 au 20 novembre, 80 000 affiches avec les visages de Joëlle Aubron et Nathalie Ménigon sortaient des rotatives.
[...] Depuis que leurs portraits avaient été affichés dans les lieux publics, elle se sentait épiée.
[...] Quatre ans de clandestinité. Quatre ans à se planquer comme des rats. Quatre ans à ne plus voir ni famille ni amis. Quatre ans à attendre le Grand Soir ou les balles meurtrières des flics. Elle n’avait pas 25 ans et se sentait fourbue, comme après une vie passée à l’usine.
❤️ Le bouquin tient plus du roman que du reportage et pour nous faciliter la lecture, l'auteure va jusqu'à mettre en scène un personnage imaginaire, un flic lancé sur les traces des terroristes et fasciné par la blonde jeune femme aperçue à Deauville, le montage est agréable et la lecture fluide éclaire ces années oubliées.
Après de longues années de prison, Joëlle Aubron décèdera en 2006 à 46 ans d'une tumeur au cerveau.
Ses compagnons d'armes lui auront survécu mais sans plus faire d'étincelles : Action Directe ne fut qu'un feu de paille qui tenta d'incendier bien maladroitement les années 80.
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