[...] La chute de la maison Carruthers.
Après "Le sang des innocents", Shawn Cosby déçoit quelque peu avec ce récit violent jusqu'à l’écœurement auquel il manque une trame un peu plus solide et un message un peu moins simpliste que "notre monde, régi par le fric et la violence, court à sa perte".
❤️❤️🤍🤍🤍L'auteur, le livre (544 pages, octobre 2025, VO 2025) :
Début 2024, on avait découvert l'écrivain afro-américain Shawn Andre Cosby avec un excellent roman noir : Le sang des innocents, le troisième qui était paru en français.
Le revoici en 2025 avec Le roi des cendres, traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Szczeciner.
Le pitch et les personnages :
Il y a là Roman Carruthers qui « se faisait un nom parmi la bourgeoisie d’Atlanta – le nouveau paradis des Afro-Américains », il brasse de l'argent, beaucoup d'argent, de l'argent sale qu'il blanchit, de l'argent lavé qu'il multiplie. Il est caïman riche.
Son père est accidenté : Roman doit quitter Atlanta et retrouver les siens à Jefferson Run près de Richmond en Virginie, sa sœur Neveah et son frère Dante.
Leur père est à l'hôpital. C'est lui Le roi des cendres : il gérait une entreprise funéraire d'incinération, un crématorium qu'il avait bâti avec son épouse. Tous deux étaient partis de rien et avaient élevé leurs enfants pour les sortir de l'ornière, de la pauvreté d'une petite ville US sinistrée.
La mère, Bonita, a disparu il y a longtemps, assez mystérieusement.« En dépit des années, la disparition de Bonita Carruthers restait le fait divers le plus tristement célèbre de Jefferson Run.[...] Ma mère a disparu quand j’avais seize ans. Personne ne l’a jamais revue. Les habitants du coin sont convaincus que c’est notre père qui l’a tuée – après tout, il possède un crématorium, alors pourquoi ne s’en serait-il pas servi pour faire disparaître la femme qui le trompait ?Ça fait vingt ans, maintenant, mais les gens continuent de nous demander de but en blanc si notre père a assassiné notre mère.[.. ] Ce n’étaient pourtant pas les sujets de conversation qui manquaient. Mais pour les habitants de Jefferson Run, aucun n’égalait la disparition de Bonita Carruthers, soupçonnée d’avoir été assassinée par son mari. »
Roman débarque à Jefferson Run en plein merdier : son jeune frère Dante venait de se mettre en tête de devenir apprenti dealer et s'est attiré les foudres des vrais durs du coin, le gang des BBB, les Black Baron Boys.
Entre la disparition inexpliquée de la mère, l'hospitalisation du père, la violence des gangs, les bêtises de l'un et le fric de l'autre, ... il y a là de quoi dérouler un roman bien noir où l'on sait que les plus mauvaises décisions vont entraîner les plus funestes actions.
Roman, animé des meilleures intentions, court droit vers l'enfer.
« Je vais tout arranger , Nev, murmura-t-il. Je te le promets. Je vais tout arranger. »
Le moment est-il venu de « la chute de la maison Carruthers » ?
♥ On aime un peu :
➔ Shawn Cosby délaisse le thème du racisme qui forgeait l'armature solide de son précédent roman (Le sang des innocents) : cette fois nous voici entre blacks, la famille Carruthers est noire, le gang des BBB est afro-américain.
De l'écrivain réputé comme celui de la violence et de la colère, il ne reste plus que la violence.
Une violence omniprésente, où l'on s'y fait brûler vif, exploser et trucider de moult façons, bouffer par les chiens, jusqu'à l’écœurement.
« – Tu trouves pas que ça fait beaucoup, là ?– Si, si. Beaucoup d’alcool, beaucoup de drogue, beaucoup de morts autour de nous. Tu as raison, ça fait beaucoup. »
➔ Et puis on a un petit peu de mal à croire au personnage de Roman : le gars super malin, super friqué qui manipule tout le monde, qui ment comme il respire (même à ses frère et sœur), et qui, ça tombe vraiment trop bien, reçoit l'aide d'un super pote façon Chuck Norris, capable de le sortir à coups d'explosifs des pires situations.
L'engrenage est trop diabolique et trop violent pour nous convaincre. L'intrigue familiale est cousue d'un fil un peu trop blanc. Le lecteur regarde tout cela partir en vrille avec beaucoup de curiosité, un peu d'intérêt mais pas mal de détachement.
➔ Alors bien sûr S. A. Cosby écrit bien, il sait toujours trouver de bonnes formules pour nous épater mais cette fois-ci, écœuré par la violence de son récit, on se demande bien quel est le message qu'il a voulu nous faire passer ?
➔ Alors bien sûr S. A. Cosby écrit bien, il sait toujours trouver de bonnes formules pour nous épater mais cette fois-ci, écœuré par la violence de son récit, on se demande bien quel est le message qu'il a voulu nous faire passer ?
Ce monde serait donc gangrené par le fric et la violence, ce monde serait en train de courir à sa perte ?
Oui, certes, mais c'est un peu court tout de même, Mr. Cosby, vous nous aviez habitués à beaucoup mieux.
« La forêt patientait. Elle attendait sûrement que les hommes appuient sur le gros bouton rouge ou fassent tomber l’éprouvette qui signerait la fin de leur existence, afin de pouvoir enfin se réapproprier le terrain, le ciel et la nuit. »
Pour celles et ceux qui aiment menottes et martinet.
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Livre lu grâce aux éditions Sonatine (SP).
Ma chronique dans la revue ActuaLitté.


