lundi 15 février 2010

Le silence de la pluie

L’homme de Rio.

On avait déjà évoqué le tenancier de la Grande Crimerie qui nous avait conseillé deux voyages en classe polar.
La première destination était celle de Bethléem, avec Le collaborateur.
Nous voici aujourd'hui partis pour Rio, un coin plus sympa de prime abord que la Palestine, avec Le silence de la pluie du brésilien Luiz Alfredo Garcia-Roza.
Au début, on se croirait dans un polar américain, mais d'Amérique du Nord : argent, révolver, femme fatale, escroquerie à la prime d'assurance, ...
Et il faut plusieurs chapitres avant que la chaleur et la sensualité du sud viennent colorer les rues de Rio et les pages de ce bouquin.

[...] Dans les films américains, les policiers n'étaient pas aussi désemparés. Le médecin légiste dévoile pratiquement le crime à l'inspecteur, celui-ci n'a qu'à faire une poursuite spectaculaire dans les rues de New-York, San Francisco ou Los Angeles. Au cas où le légiste échouerait, il y a toujours la possibilité d'envoyer au FBI un cheveu trouvé sur le lieu du crime et le lendemain nous savons même de quelle équipe de football son propriétaire est supporter. Ici dans cet agréable tiers-monde, le rapport du légiste indiquait rarement si la victime était morte par balle ou par empoisonnement.

Le héros de Garcia-Roza est un flic plutôt sympa : il traîne un nom de philosophe (Espinosa), fréquente les bouquinistes chez qui il achète des Joseph Conrad (page 156), empile ses bouquins sans étagères pour que la femme de ménage puisse balayer son salon, ... et évite soigneusement de faire confiance à ses propres collègues.
Le montage de l'intrigue est bien vu : d'entrée de jeu le lecteur en sait plus que l'inspecteur lui-même pour qui tout parait trop simple dans cet assassinat que nous savons être un suicide.
Un inspecteur qui passe son temps à élucubrer des scénarios plus ou moins vraisemblables et à échafauder des hypothèses qu'il démonte aussitôt.

[...] J'étais en train de devenir confus. C'est incroyable la capacité que j'ai à m'égarer.

Pour un peu on aimerait bien qu'Espinosa continue à tourner en rond dans les rues de sa ville et les méandres de son enquête, histoire de prolonger le plaisir de la balade.

[...] Le délai que le commissaire principal m'avait donné pour me charger de l'affaire et présenter un rapport pour le moins éclairant était sur le point d'expirer et, malgré le fait que la situation originelle avait été augmentée d'une mort supplémentaire et d'une disparition et que l'arme du crime avait été retrouvée, je ne considérais pas que j'avais fait un progrès significatif dans l'élucidation de la mort de Ricardo Carvalho.

Un polar original et bien mené, une promenade pas toujours paisible mais toujours agréable dans les rues et les bars de Rio, ... que demander de plus ?
On a même droit en prime à un dénouement très (comment dire sans trop en dévoiler ?) très plaisant ? où l'assassin reçoit un châtiment qu'il ne méritait pas (ce doit être ça qu'on appelle un happy end dans le sud).
Last call : le commandant Garcia-Roza prie les lecteurs du vol Actes-Sud 288 pour Rio de bien vouloir embarquer sans tarder, décollage imminent !


Pour celles et ceux qui aiment les jolies filles de Copacabana.
Babel-Actes Sud édite ces 288 pages qui datent de 1996 en VO et qui sont traduites du portugais par Valérie Lermite et Eliana Machado.
TLP en parle (et très bien).

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