[...] Ça devait être lui. Le Fils. Il était revenu.
Quel plaisir de relire
Le fils du norvégien
Jo Nesbø l'un de nos auteurs de polars préférés.
Un épisode que l'on avait découvert à sa sortie en 2015 [
clic] mais que l'on vient de relire avec beaucoup de plaisir.
On l'a déjà dit, Nesbø est sans doute l'auteur européen de polars le plus "américain" et ses bouquins, même s'ils se passent à Oslo (ou parfois en "province" à Bergen !), ses bouquins sont construits comme les meilleurs thrillers US.
Et
Le fils est sans aucun doute l'un de ses meilleurs polars même si son détective fétiche
Harry Hole, n'y apparaît pas.
D'entrée de jeu cet épisode nous plonge dans les bas-fonds de la pègre de la capitale norvégienne.
Dehors, on croise sdf, toxicos et prêtres douteux, à l'intérieur, on hallucine dans une prison de haute sécurité lorsqu'on découvre la combine manigancée par le directeur de la taule et des avocats véreux : en échange de dosettes d'héroïne, faire porter le chapeau d'assassinats commandités à l'un des prisonniers, Sonny, un jeune drogué incarcéré depuis des années qui n'a plus rien à perdre ou qui a déjà tout perdu.
Il y a quelque chose de pourri au royaume de Norvège.
[...] C'est une longue histoire. Il a été question pendant plusieurs années d'une taupe dans nos services qui rapportait tout directement à une certaine personne qui dirige l'ensemble ou presque du trafic de stupéfiants et de la traite d'êtres humains dans Oslo.
Mais les choses vont changer lorsque Sonny va découvrir par hasard que son père ne s'était pas, comme tout le monde l'a cru, donné la mort pour échapper à une accusation de flic ripoux. Des amis bien intentionnés l'avaient suicidé pour se débarrasser d'un policier trop intègre et maquiller des affaires de corruption.
[...] « Je connaissais ton père », dit Johannes Halden. [...] « J'étais son indic », dit Johannes. Sonny était assis dans le noir contre le mur du fond, et on ne pouvait pas voir son visage. Johannes n'avait pas beaucoup de temps, bientôt ils seraient enfermés chacun dans leur cellule pour le soir. Il inspira. Car elle allait sortir maintenant, la phrase qu'il se réjouissait et redoutait tout à la fois de prononcer, la phrase dont les mots étaient enfouis si profondément dans sa poitrine qu'il craignait qu'ils n'aient pris racine et ne puissent plus sortir. « Ce n'est pas vrai qu'il s'est suicidé, Sonny. » Voilà. C'était dit. Silence. « Tu ne dors pas, Sonny ? »
Dès cette première partie alors même que rien n'a vraiment commencé, on est happé par cette histoire : sans doute est-ce dû à l'épaisseur des personnages, les gentils comme les méchants.
Et puisque Harry Hole n'est pas au rendez-vous c'est un duo de flics mal assortis et bien sympathiques qui mène l'enquête : lui est un vieux briscard, un des derniers flics intègres de la police d'Oslo visiblement, et elle une grande sauterelle d'un blond nordique, une intellectuelle ambitieuse qui potasse ses bouquins de droit pendant les pauses car elle n'a pas l'intention de moisir bien longtemps à l'étage de la brigade criminelle.
Le fils Sonny a donc décidé de reprendre son destin en main, de régler ses comptes et ceux de son père et d'actionner lui-même le bras de la Justice : les affreux peuvent numéroter leurs abattis.
[...] Ça devait être lui. Le Fils. Il était revenu.
[...] Il faut bien que quelqu'un mette de l'ordre dans toutes ces saloperies ici-bas.
[...] Vous savez ce que son père, Ab, disait souvent ? déclara-t-il en tirant un peu sur son pantalon. Il disait que le temps de la grâce est passé et que le temps du châtiment est venu. Mais comme le Messie est apparemment en retard, c'est à nous de faire le travail. Il n'y a personne d'autre que Sonny qui puisse les punir.
[...] Il s'en prend à ce qui est pourri dans notre société.
— Mais il est lui-même un criminel.
— C'est précisément tout l'intérêt de l'histoire.
Rares sont les polars où le lecteur prend fait et cause pour le serial-killer !
On jubile de suivre pas à pas Le fils qui va punir les méchants par là où ils ont pêché, et qui à sa façon, va rendre une justice très personnelle, puisque ni celle des hommes ni celle de dieu ne se soucie de nous.
Un thème cher à Jo Nesbø.
Mais on a aussi appris que cet auteur était passé maître dans l'art de nous faire suivre de longues fausses pistes au cours de ses intrigues tortueuses : Le fils n'échappe pas à la règle et le lecteur aura finalement droit à quelques jeux de miroirs et quelques surprises où la morale sera encore un peu plus malmenée.
Pour celles et ceux qui aiment les justiciers.
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