The biggest cold case.
On avait déjà rencontré le suédois Leif Gustav Willy Persson avec un drôle de roman mi-polar, mi-espionnage. C’était il y a deux ans presque jour pour jour avec La nuit du 28 février, bien nommé en cette saison. Ce précédent bouquin dressait le portrait d’une sorte de J. Edgard Hoover suédois à la tête de la police secrète (la DST suédoise) et déjà évoquait le célèbre politicien, Olof Palme.
Du même auteur, voici un autre pavé : Comme dans un rêve et nous sommes toujours en février, ce même 28 février 1986, jour du traumatisme suédois, cette soirée où Olof Palme est assassiné en pleine rue.
Pour être exact nous sommes en 2006 : vingt ans après. L’assassinat n’a jamais été élucidé et c’est devenu l’une des affaires criminelles les plus célèbres et un peu la honte de la police suédoise.
Leif GW Persson imagine donc qu’en 2006, le directeur de cette police ré-ouvre le dossier (l’hénaurme dossier, le plus gros dossier criminel de toute la planète) et reprend l’enquête à zéro … avec ce qui reste des témoins car beaucoup sont décédés depuis.
[…] - Je ne sais pas si tu es passé chez nous jeter un coup d’ œil, mais il y a une quantité industrielle de documents. C’est tout simplement gigantesque. Le dossier occupe l’équivalent de six bureaux dans notre couloir. […] La salle est pleine à craquer de classeurs et de cartons, du sol au plafond.
[…] D’après ce que nous en savons, mes collègues du groupe et moi-même, c’est le plus gros dossier de l’histoire mondiale de la police. Apparemment, il est plus volumineux que le dossier d’instruction sur le meurtre de Kennedy, et que l’enquête sur l’attentat du Jumbo Jet de Lockerbie, en Écosse.
Olof Palme c’est un peu le Mitterrand suédois et son assassinat mystérieux est un peu à l’Europe, ce que celui de JFK est aux US.
Que ceux qui espéraient un polar à l’américaine, urbain et trépidant, passent leur chemin. La marque de fabrique de Leif GW Persson, c’est la procédure documentée, le dossier minutieux. Autant dire qu’avec les montagnes de cartons refroidis et d’archives poussiéreuses que représente le dossier Palme, il peut s’en donner à cœur joie !
La petite équipe mobilisée par le chef de la police nous est vite sympathique et l’on se passionne pour ce travail de fourmis qui consiste à éplucher, classer, archiver, indexer, tous ces dossiers, interrogatoires, procédures, … qui dorment depuis vingt ans dans les sous-sols.
Les conditions de l'assassinat du premier ministre sont scrupuleusement et fidèlement retracées.
Bien vite le manque de rigueur et les incohérences de l’enquête initiale refont surface et c’est de nouveau l’heure des hypothèses et des remises en cause.
Le reste de l'enquête n'est évidemment que pure fiction spéculative dont le principal intérêt est de nous emmener explorer les arcanes et les coulisses des milieux politico-policiers de la Suède : la Säpo (la DGSE ou la DST de la Couronne), le marchand de canons Bofors (le Dassault suédois) ...
Mais les amateurs de scoop fracassant ou de révélation croustillante en seront pour leurs frais.
Il faut même un peu de courage pour rester accroché au copieux dossier durant ses 600 pages, d'autant qu'à plusieurs reprises (à de trop nombreuses reprises) intervient un personnage imbuvable, un flic grossier et machiste, un beauf complet (oui, même là-haut y'en a) qui nous vaut quelques pages de grossièreté complaisante, assez désagréables à parcourir : on veut bien croire que Leif Persson a des comptes à régler avec peut-être quelques anciens collègues mais quel intérêt ici ? Autant dire qu'une fois qu'on a compris que l'affreux jojo n'apportait pas grand chose à l'enquête, on traverse ces marais nauséabonds en diagonale.
Reste l'équipe d'enquête on l’a dit : quelques filles et garçons sympas (ouf !), ravis de travailler pour le grand patron qui dirige les investigations en douce et en marge de l'enquête officielle, sous prétexte de ré-indexation des archives du dossier Palme. Cela nous vaut quelques pages savoureuses.
Pour celles et ceux qui aiment l’Histoire de leurs voisins.
D’autres avis sur Babelio. Namoureux et Jean-Marc en parlent.