mercredi 21 janvier 2015

Le livre d’un été (Tove Jansson)

Les feux de la Saint-Jean

Tove Jansson n’était pas connue de nos services mais plutôt des enfants finlandais et scandinaves pour lesquels elle avait crée les Moomins.
On serait bien en peine de retrouver comment Le livre d’un été est arrivé dans notre liseuse.
Ce livre est celui des souvenirs d’une petite-fille perdue avec sa grand-mère (et son père) sur une petite île perdue d’un archipel perdu au fin fond du Nyland oriental dans le golfe de Finlande.
Autant dire, le bout du monde.

[…] On ne le répètera jamais assez – à quel point la mousse est fragile. On marche dessus une fois et elle se redresse à la première pluie. La deuxième fois, elle ne se redresse plus. La troisième, elle meurt. Il en est de même avec les eiders, la troisième fois qu’on les fait fuir de leur nid, ils ne reviennent jamais.

Sans trop de préliminaires ni d’explications, les courts chapitres s’enchaînent comme autant de micro-nouvelles.
Et les souvenirs défilent : la tempête, la pose des filets, la baignade, la petite fille de l’île voisine, la Saint-Jean (of course), …
On suit le passage des saisons.

[…] La grand-mère avait mal aux jambes, peut-être à cause de la pluie, et elle ne pouvait pas se promener sur l’île autant qu’elle le désirait. Mais elle marchait un petit peu chaque jour avant la nuit et nettoyait le sol. Elle supprimait toutes les traces des hommes. Elle ramassait des clous, des morceaux de papier, de chiffon, ou de plastique, des bouts de bois tachés de goudron, un couvercle ou un autre, puis elle descendait jusqu’au rivage et brûlait tout ce qui pouvait se consumer. La grand-mère sentait que plus l’île devenait propre, plus elle devenait étrangère et distante. « Elle se libère de nous, pensait-elle, bientôt elle sera déserte. Presque déserte. »

Fantasques, excentriques, la grand-mère et sa petite-fille ont un grain, un petit grain pour la petite-fille, un plus gros pour la grand-mère. Ce petit bouquin un peu décalé nous épargne toute mièvrerie ‘infantile’ et nous gratifie de quelques illuminations poétiques.

[…] Ma grand-mère disait toujours que lorsque les cousins dansent et qu’il y a la pleine lune, il faut faire attention.
— Pourquoi ? demanda Sophie.
— C’est le grand jour de l’accouplement, et alors rien n’est sûr. Il faut prendre bien garde à ne pas provoquer le sort. À ne pas renverser de sel, et à ne pas casser de miroirs. Et si les hirondelles quittent la maison, il est préférable de déménager le soir même. Tout ça est très compliqué.
— Comment est-ce que ta grand-mère pouvait avoir des idées aussi ridicules ? demanda Sophie étonnée.
— Ma grand-mère était superstitieuse.

Et puis la figure muette du mystérieux papa, à la fois proche et lointain.
Le temps de ces quelques pages pleines de tendre poésie, on partage l’été d’une drôle de famille.


Pour celles et ceux qui aiment les feux de la Saint-Jean
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