samedi 14 mars 2020

City of Windows (Robert Pobi)

[...] La haine, ça fait faire du chemin.

En ces temps confinés, les bons thrillers sont une valeur refuge et une saine alternative au binge-watching de séries tv.
City of Windows du canadien Robert Pobi fait partie de ces page-turner captivants, capables de vous prendre la tête plusieurs heures d’affilée.
L’intrigue est menée à vive allure, d’une écriture sèche à l’ironie mordante : un sniper d’élite se met à faire des cartons longue distance sur les flics de New-York.
Une balle, une tête. À 900 mètres de là.
[...] Rien n’est pire que de pourchasser un homme armé d’un fusil dans une ville pleine de fenêtres.
[...] Que comptez-vous faire ? » demanda Whitaker. Lucas leva les yeux sur le phare en haut de la colline. « Ne vous inquiétez pas, j’ai un plan », mentit-il. 
❤️ Mais ce sont les personnages chargés de l’enquête qui vont vraiment emporter le lecteur : à commencer par le héros Lucas, prof d’astrophysique (tendance Asperger, à cinq ans il décodait le mouvement des étoiles avec une vieille paire de jumelles et une carte d’astrologie, pas d’astronomie) capable de décoder l’agencement mathématique du monde et donc aujourd’hui de calculer où était posté le sniper à plusieurs centaines de mètres de là.
[...] La réponse était là quelque part. Puis il comprit. C’était sous son nez. Comme tout le reste, il ne s’agissait pas de ce qui était là. Il s’agissait de ce qui n’y était pas.
[...] Vous avez faim ? » demanda Whitaker. Lucas garda le silence, les yeux rivés sur la table. « Voyez-vous, nous autres humains avons besoin de nourriture. Vos chefs extraterrestres n’ont pas eu le temps de vous apprendre ça avant de vous envoyer ? » 
Je ne suis pas sûr que ‘les Aspies’ soient très heureux de se voir utiliser à toutes les sauces médiatiques depuis celle du fameux Homard mais il faut bien reconnaître que la caricature de leurs super talents extraterrestres et de leur asociabilité sauvage fait d’eux de très très bons personnages de romans.
Au-delà des ses personnages, l’autre intérêt de ce bouquin c’est la fenêtre qu’il ouvre à notre regard sur les États-Unis, un regard cynique et désabusé sur les suprémacistes blancs adeptes des armes à feu (l’air est connu mais la mise en perspectives par Pobi plutôt vivifiante) :
[...] Puis le coup de feu retentit. Les cris s’élevèrent. Les hommes du Klan se mirent à cavaler en tous sens comme si c’était jour de soldes sur les grands draps blancs.
[...] L’ordinateur a accouché d’une liste d’actes criminels invraisemblable – vous n’imaginez pas le bordel que c’est, ce pays, quand on commence à se pencher sur les statistiques. Je m’étonne qu’on ne se soit pas encore tous fait trucider par nos voisins.
[...] Depuis le 11 septembre, moins de deux cents Américains ont été victimes de ce que l’on peut appeler le « terrorisme islamique » sur le sol des Etats-Unis. Moins. De. Cents, articula Lucas. L’extrémiste musulman de service ne pose pas de réelle menace, et je ne dis pas que ça ne peut pas changer en un clin d’œil, mais à l’heure qu’il est, tu as plus de chances de mourir dévoré par ton chat. La vraie menace, c’est ton voisin de palier chrétien. Ces cinglés tuent – quoi ?– douze, quinze mille Américains par an.
[...] – Pour ma part, je pense que les armes me protègent de celles qui sont entre les mains des autres.
– C’est toute la beauté de ce pays ; vous pouvez croire ce que vous voulez, même si les chiffres prouvent le contraire.

Pour celles et ceux qui n'aiment pas les armes à feu.
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