Le rapport de Schenkel.
L’allemande Andrea Maria Schenkel s’est emparée d’un fait divers des années 20 qui avait vu une famille sauvagement assassinée dans sa ferme au fin fond de la Bavière.
Son petit bouquin La ferme du crime, replace cette sombre histoire à une sombre époque : juste après guerre, les survivants à peine libérés ou démobilisés.
On découvre le drame (et plus tard ses raisons) par touches successives, on tourne autour, en spirale, au fil des témoignages des uns et des autres.
Chaque court chapitre donne la parole à l’un des acteurs du drame. Peu à peu, on découvre la triste vie de cette famille à l’ombre écrasante du père Danner.
[…] Quand Loïs et mon mari sont revenus à la ferme, ils ont rien eu besoin de me raconter. De loin déjà, à la façon dont ils marchaient, j’ai compris qu’il avait dû se passer quelque chose de terrible. Quand ils se sont assis dans la salle à manger, tous pâles, j’en ai été convaincue. On pouvait lire l’horreur sur leurs visages. Dans les nuits qui ont suivi, mon mari s’est souvent réveillé en sursaut. La vision de ces morts ne lui laissait pas de répit.
On a du mal à imaginer qu’une chose pareille arrive chez nous. Mais que Danner soit pas mort dans son lit, ça m’étonne pas plus que ça.
Il faut pas dire du mal des morts, c’est pour ça que j’aime pas parler d’eux. Vous savez, on vit dans un petit village. les commérages vont bon train, je préfère pas trop en dire.
Et oui, un petit village où l’on n’en dit pas trop même si chacun sait bien ce qui se passe à Tannöd, derrière les murs de la ferme des Danner. Une sombre famille dans une sombre région à une sombre époque. Il y avait de quoi en vouloir à cette famille, certainement de quoi vouloir venger quelque chose ou quelqu’un ?
Dès les premières pages tous les ingrédients du massacre sont réunis, haine, envie, désir. Ce n’est qu’une question de temps, une question de pages.
[…] Quand j’ai vu les corps, je me suis senti mal.
Et c’est pas que je sois tellement impressionnable. À la guerre, j’en ai vu plus qu’assez, vous pouvez me croire. Tous ceux qui ont fait la guerre, ils ont bien vu assez de morts, ça devrait suffire pour toute une vie.
Une ambiance pesante, étouffante (on repense aux images du Ruban blanc, on songe aussi parfois au Rapport de Brodeck dont l’ombre imposante écrase un peu ce petit livre).
Pas un seul des personnages n’est vraiment sympathique. Finalement leur silence les rend tous plus ou moins complices ou pire, de ce qui se passait chez les Danner et donc de ce qui terminera cette histoire.
Heureusement le livre est court : quelques pages pour apprécier l’écriture d’Andrea Maria Schenkel mais pas trop pour ne pas nous happer complètement dans cette horreur moyenâgeuse.
Certainement pas une promotion pour le tourisme rural en Bavière.
Pour celles et ceux qui aiment les sombres histoires, même si elles sont vraies.
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