vendredi 9 septembre 2022

Le destin de l'ours (Dario Correnti)

[...] Et le rugissement déchire le silence. Énorme, terrifiant.

Après La nostalgie du sang et la découverte de Dario Correnti, un pseudo qui cache deux auteurs italiens, on était impatient de retrouver le savoureux duo de personnages au cœur de cette série policière italienne.
Rendez-vous a donc été pris avec Le destin de l'ours.
On retrouve bien sûr Marco Besana, un vieux routier aguerri de la presse milanaise que le journal en difficulté a fini par pousser dehors un peu avant la retraite.
Sa jeune complice, c'est Ilaria Piatti, une stagiaire qui rêve d'intégrer la section criminelle du journal, mais en vain car le quotidien en est aujourd'hui réduit à compter les clics sur les réseaux sociaux. 
[...] Besana l’examine. 
« Qu’est-ce que c’est que cette tenue, Morpion ? 
– Quoi ? Tu n’aimes pas ? 
– Tu ressembles à un fauteuil provençal. 
– Merci, Marco. Déjà que je suis gavée d’anxiolytiques, il me manquait juste un peu de soutien moral. »
Et nous suivons les deux complices sur les traces d'un ours amateur de randonneurs.
[...] Son corps a été traîné sur un kilomètre, loin de sa tête et de son sac à dos, puis recouvert de feuilles, en prévision d’une consommation ultérieure. Il était encore en vie au moment de l’attaque de l’ours.
Tout comme dans le premier épisode, on retrouve les traces d'une véritable affaire ancienne : celle d'une empoisonneuse en série, la Vecchia dell'aceto, la Vieille dame au vinaigre, Giovanna Bonanno qui sévissait (ou plutôt qui faisait profiter ses consœurs de ses bons et loyaux services) en Sicile vers 1750.
Mais l'impatience fut sans aucun doute mauvaise conseillère et l'on s'est précipité un peu trop vite sur les traces des deux journalistes : l'intrigue peine franchement à prendre corps (pour un dénouement finalement un peu too much) et les histoires perso de Marco et Ilaria tournent en rond, façon je t'aime moi non plus.
Tout cela sent vraiment le réchauffé de sauce milanaise dilué dans beaucoup d'eau. 
Oui, le verdict est un peu dur et on ne saurait trop vous conseiller de vous ruer sur le premier épisode (et de vous en contenter, pour le moment, en attendant mieux).
Notons quand même quelques passages bienveillants sur les voisins Suisses (qui sont sans doute à l'Italie du Nord ce que les belges sont aux français) :
[...]– Pour ma part, la Suisse ne m’évoque que le chocolat, les montres et ces couteaux de poche rouges avec plein d’outils.
– Tu la sous-évalues, Piatti, dit Marco avant de boire une gorgée de bière locale. Tiens, pense au Velcro. C’est un type du canton de Vaud qui en a eu l’idée en revenant d’une balade dans les bois. Il a dû ôter un tas de fruits de bardane de ses vêtements et du pelage de son chien, tu vois ce que c’est, ces petites boules qui s’agrippent ? Il les a observées au microscope et il a compris qu’il pouvait en faire quelque chose. L’ennui est une source d’inspiration, par ici. 
– D’autres exemples ? 
– Le bouillon cube, inventé par un demi-Italien, Julius Maggi. Ou le cellophane, conçu par un Zurichois. La feuille d’aluminium. Et puis la brosse à dents électrique, tu te rends compte, Piatti ? Née de l’imagination d’un dentiste de Genève. Qui aurait cru qu’un dentiste genevois avait de l’imagination ? » Ilaria rigole. 
« J’ai gardé le meilleur pour la fin : le flacon à tête de canard, qui a révolutionné le nettoyage des cuvettes de chiottes. Eh bien, le premier prototype est né à Zurich dans les années 1980. 
– La vache, ils ont changé le monde ! 
– Tu vois ? Tu es bourrée de préjugés, répond Besana. Hélas, en matière de canards, ils ont aussi commis le pire : l’Ententanz, mieux connue sous le nom de « Danse des canards », est également Swiss made. 
– L’ennui est une chose dangereuse. 
– Ça dépend, reprend Besana. Sans les Suisses, pas d’absinthe, et qui sait si sans elle, Verlaine et Mallarmé auraient écrit des poèmes ? C’est un médecin de Neuchâtel qui l’a créée à des fins thérapeutiques. Ensuite, heureusement, elle a été utilisée à meilleur escient à Paris. 
– C’est vrai ? 
– Même chose pour le LSD, sorti des laboratoires Sandoz de Bâle grâce au grand Albert Hofmann, chimiste de génie qui, soit dit en passant, est mort à l’âge vénérable de cent deux ans. Comme quoi, cette substance n’est pas si néfaste. »

Pour celles et ceux qui aiment les journalistes.
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