mercredi 1 juin 2016

Le col du chaman (Stan Jones)

[...] Taggaqvik ? Ça veut dire “le pays des ombres”.
Aujourd’hui, ça s’appelle le col du Chaman.

On est à peine descendu de la motoneige d'Olivier Truc qui nous avait emmené à deux reprises en balade dans les neiges de Laponie chez les samis, que l'américain Stan Jones nous propose de renfourcher nos machines et de franchir Le col du chaman pour une virée en Alaska.
C'est le deuxième bouquin de Stan Jones (le premier pour nous) chez les Esquimaux ou encore les Inuits ou plus précisément encore, chez les Inupiat.
À quelques milliers de kilomètres de distance mais sous les mêmes latitudes polaires, les romans des deux auteurs partagent de nombreux points communs (autres que les motoneiges) : la recette désormais classique du polar ethnique, le choc entre la culture occidentale et celle des 'premières nations', une légère intrigue policière fortement ancrée dans le folklore et la culture locale, une visite guidée des réalités sociales et économiques de ces pays méconnus.
Alors qu'Olivier Truc mettait en scène une fliquette venue du 'sud' pour nous servir de guide aux côtés du héros-flic (un lapon de la police des rennes), chez Jones c'est le héros-flic lui-même, Nathan Active, qui vient du 'sud' (enfin du sud : Anchorage, donc c'est le grand nord quand même) et qui se confronte aux us et coutumes du conseil tribal et des 'locaux'.
[...] Bien qu’ayant grandi à Anchorage, il était né à Chukchi et, mieux encore, il était entièrement inupiaq. Il avait quitté le village à dix-huit mois quand ses parents adoptifs, des enseignants blancs, avaient choisi de s’installer dans la principale ville d’Alaska parce qu’ils en avaient assez de la cambrousse. Certes, il ne serait jamais revenu à Chukchi si sa hiérarchie ne l’y avait affecté pour son premier poste, et il sauterait dans le premier avion pour Anchorage dès qu’il obtiendrait sa mutation. Malgré tout, voilà deux ans qu’il vivait sur place.
[...] Souvent, il ne voyait pas bien où voulaient en venir les Esquimaux. Peut-être était-il trop borné, ou bien les vingt ans passés à Anchorage avaient-ils créé un fossé culturel infranchissable.
Tout commence par une bonne action du Smithsonian Institute qui entreprend de restituer aux autochtones une momie Inupiaq datant des années 20, communément appelée Tonton-des-glaces.
À peine arrivée dans le petit musée du folklore local, la momie est volée et l'on retrouve bientôt un vrai cadavre, encore bien frais celui-ci, poignardé par le harpon qui accompagnait la momie.
Meurtre rituel d'un descendant de la momie ? Règlement de comptes sur la banquise ? Œuvre du kikituq d'un angatquq (l'esprit un ancien chaman) ? Malédiction ancestrale ?
[...] Des fois, quand quelqu’un meurt et qu’on le respecte pas, y va pas dans l’au-delà. L’univers le refroidit, c’est comme ça qu’ils disent, les anciens. Ces morts-là ont une très bonne oreille, même qu’ils peuvent entendre les renards et les lapins dans les fourrés. Ils sentent plus le froid et leur corps est tout léger, ils sont capables de marcher au sommet des arbres et de franchir une rivière sans se mouiller.
Refroidi par l’univers, c’est comme ça qu’ils disent.
Attention, c'est un bouquin à lire discrètement chez soi (évitez les transports en commun) : au fil des pages on se surprend à essayer toutes sortes de grimaces pour 'parler' Inupiaq ...
[...] Maiyumerak se détendit, sourit et arqua les sourcils derrière les verres miroir, acquiescement à la manière inupiaq.
[...]  La secouriste se releva et fronça le nez, signe de négation chez les Inupiat.
Une belle balade dans les neiges et les glaces mais des personnages peut-être moins attachants que les lapons d'Olivier Truc.

Pour celles et ceux qui aiment les motoneiges.
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