vendredi 2 septembre 2011

L’armée furieuse (Fred Vargas)

Le pelleteux de nuages dans le bocage normand.

Cet été, il fallait vraiment passer ses vacances sans lunettes au fin fond de la Creuse pour manquer le dernier Fred Vargas, promis au statut de polar de l'été, objet d'un battage médiatique soutenu.
Mais le succès étant ce qu'il est, cette Armée furieuse allait-elle tenir ses promesses ?
Reconnaissons que l'amie Vargas démarre très fort.
Grâce à Tavernier, James Lee Burke et Dave Robicheaux, on avait découvert il y a peu les brumes électriques des marais de Louisiane, propres à faire surgir du néant toute une armée de confédérés.
Avec Fred Vargas, ce sont maintenant les sous-bois du bocage normand qui laissent entrevoir, à la nuit tombée, la Mesnie Hellequin, l'Armée Furieuse.

[...] - Comment ça se présente ? De  quoi s'agit-il ?
- Il y a eu un meurtre - un homme - et une tentative de meurtre sur une vieille femme. On ne pense pas qu'elle survivra. Trois autres morts sont encore annoncées.
- Annoncées ?
- Oui. Parce que les crimes sont directement liés à une sorte de cohorte puante, une très vieille histoire.
- Une cohorte de quoi ?
- De morts en armes. Elle traîne dans le coin depuis les siècles des siècles, et elle emporte avec elle les vivants coupables.
- Parfait, dit Noël, elle fait notre boulot en quelque sorte.
- Un peu plus car elle les tue. Danglard, expliquez leur rapidement ce qu'est l'Armée Furieuse.

Une ‘vraie’ légende qui veut que depuis l'an mille, de Suède en Touraine, en passant par l'Allemagne et la Lorraine, et jusqu'en Normandie donc, les nuits de pleine lune voient défiler l'Armée furieuse du sieur Hellequin, une chevauchée d'esprits guerriers dont les âmes ne trouvent jamais le repos. Ces fantômes bruyants et caracolants viennent “se saisir” ici-bas de nouveaux compagnons malfaisants qui ne méritent pas, eux non plus, le repos éternel.
Malheur à vous, si l'on vous voit chevaucher et hurler en compagnie de la meute du sieur Hellequin : vous voici, à votre tour, condamné pour d'inavouables fautes commises ici-bas. Et condamné à très court terme : tout au plus vous reste-t-il quelques jours pour plier vos bagages avant le grand voyage. 
Alors bien sûr quand Lina, une jeune fille du village normand, affirme avoir vu trois ou quatre de ses concitoyens chevaucher à bride abattue un soir de pleine lune ... c'est la panique. D'autant qu'un premier cadavre est vite découvert.

[...] - Le Seigneur Hellequin a désigné des victimes, et un homme se croit légitimé pour les tuer. C'est ce que vous pensez ? Que la vision de Lina a fait surgir un assassin ?
[...] - Tout est venu de la Mesnie Hellequin. Elle est passée et je l'ai vue. Il y avait quatre saisis, il y aura quatre morts.

Est-ce l'Armée furieuse qui les emporte ? Est-ce un voisin “bien intentionné” qui a jugé bon de répondre à l'invitation de la Mesnie Hellequin et a voulu rendre lui-même “vraye justice” ?
De toute évidence ce mystère est de ceux auxquels Jean-Baptiste Adamsberg ne peut résister bien longtemps ! Et nous non plus !
Allez, vous prendrez bien un sucre dans votre café ou votre calva en regardant fixement ces vaches paisibles qui ne semblent pas bouger de la journée, un mystère encore plus impénétrable pour Adamsberg que celui de l'Armée du Sieur Hellequin.
Alors au final, le succès annoncé ?
Et bien c'est sans doute l'un des Vargas les plus solides, les mieux construits. L'intrigue policière (ou plutôt les intrigues car il y en a deux, presque trois, qui s'entrecroisent) est bien maîtrisée. On sent que Vargas a choisit de plaire à un plus large public.
Les dialogues savoureux, délicieux, onctueux, dont elle est coutumière, sont au rendez-vous. Les petites histoires débarquent sans prévenir, on n'y comprend goutte, et puis voilà, cinquante pages plus loin, ça resurgit et ça fait plop.
Mais on est devenu exigeant (trop ?) et tout cela semble trop raisonnable, trop sage. De belles explosions de ci, de là, mais le feu d'artifice n'est pas aussi délirant que, par exemple, dans un récent Lieu incertain.


Pour celles et ceux qui aiment les fantômes, datent-ils du Moyen Âge.
Viviane Hamy édite ces 427 pages qui datent de 2011.
On peut lire aussi cette intéressante interview de Fred Vargas herself.
D'autres avis sur Critiques Libres et Babelio.

1 commentaire:

Nicsl a dit…

moi, j'ai aimé moins au départ ( juste un petit peu moins , mais pas question de m'en passer quand même !!) et puis, à la relecture, de tous ses livres ( j'attends le prochain avec impatience , en fait ;-) ) j'ai pris un plaisir encore plus grand , je crois ...y compris ce dernier , moins bien-aimé !
essayez , tout relire , l un derrière l'autre , bien chrono, c'est GENIAL !
Fred est géniale , Nic